Autre coup de harpon, par Jean-Marie Barnaud
J’étais devant l’ordi, malhabile et néophyte, vraiment un bleu, n’imaginant pas qu’une revue de toile puisse rivaliser avec ses vis-à-vis papier, ayant dans la tête et comme horizon indépassable et impossible, tous les mythes : mythe de la NRF et de ce que je savais de sa grande époque à travers Caërdal/Suarès et d’autres monstres, mythe des Cahiers du Sud, de L’Éphémère, d’Argile etc. ; et puis ayant aussi la pratique d’autres revues auxquelles je participais régulièrement. Avec à côté dans les tiroirs, les tonnes de lettres échangées depuis des années avec l’ami de toujours, Alain Freixe, sur nos lectures et nos travaux.
Bref, « souris papivore », comme le fait dire Kazantzaki à Zorba, ne voyant pas la toile, vraiment, rivaliser avec tant de calligraphie et d’imprimerie...
Bref j’étais là, sans adsl bien sûr...,« quand il m’a harponné » [1]
(Ah ! j’aurais bien préféré, c’est sûr, tracer ma route dans l’océan indien, comme Jean-Michel Defromont. Mais non, tout sagement devant l’écran...)
C’était tout au début, au printemps 2000 ; j’ai donc reçu ce mail de F. Bon, qui disait entre autres : ... si tu veux faire partie des membres fondateurs, c’est volontiers, et plus - mais dans ce cas il faudrait remplir le paragraphe ad hoc dans la "déclaration" insérée après les statuts ci-joint, et me renvoyer - la contrainte sera une bouffe annuelle à Paname...
Belle contrainte en vérité, et belle amarre lancée, sans plus de procès, avec seulement cette confiance simple, cela qu’il faut pour vous jeter aux belles aventures !
Et tout de suite, ce fut la Petite contribution à une déstabilisation de M. Jourdain, matrice des chroniques qui ont suivi, texte que François-Marie Deyrolle devait aussi publier dans L’Atelier contemporain N°4 : ce qui dit bien qu’à l’époque je pouvais imaginer double destination à un texte, ce que je ne fais plus aujourd’hui, sauf exception, remue.net devenu le point d’ancrage naturel. Et le lieu, oui, d’où résister.
Puis-je le dire : au-delà du travail littéraire que le site a produit depuis ce coup de reins originel, c’est toujours la même confiance, la même amitié, la même reconnaissance tacite. Croyez-vous qu’un tel bonheur soit si fréquent alentour ?
Alors, oui, bon vent !