DaliaTaha | Maintenant entre, écriture

Merci pour les livres, les magazines, les articles
Pour les poèmes, même pour la rubrique conseils et la section actualités artistiques
Merci pour les livres de philosophie
Pour les dictionnaires aussi, énormes et silencieux
Comme s’ils s’excusaient de ce qu’ils essaient de faire
Merci pour les mots placés côte à côte qui deviennent des déclarations d’amour
Des déclarations de guerre, et tout l’entre deux : des poèmes
Merci pour les pamphlets et les tracts échangés en secret
Qui ébranlent les royaumes
Pour les journaux imprimés dans des salles obscures avant de faire exploser le monde
Pour les manifestes écrits dans des pièces bondées et suffocantes, pour les lettres sorties de prison clandestinement
Pour ce qui a été écrit dans les marges aux faibles lumières de la nuit
Merci pour le premier mot tracé par les enfants, brisé, tordu, comme un puzzle
Et pour le dernier mot
Ultime feuille sur la branche froide
Merci pour les inscriptions sur les pierres, missives d’un autre monde
Pour les journaux intimes des condamnés à mort
Pour ce que les adolescents ont écrit sur les murs des maisons abandonnées
Pour les pétitions des ouvriers qui ont arraché les portes des parlements
Merci pour les graffitis aux murs des villes qui interpellent leurs habitants
Et brillent plus fort que les panneaux publicitaires
Merci d’écrire sous le génocide


Lire aussi :
 Maintenant entre, silence
 Maintenant entrez, usines d’armement

(داليا طه), poétesse et dramaturge, autrice des pièces de théâtre Feux d’artifices et Keffiyeh Made in China.
Elle vit et travaille à Ramallah et enseigne à l’université de Birzeit et à l’Al-Quds Bard College.

Traduction de Henri jules Julien.

En logo : graffiti de Yazeed al-Talaa, photographie de Baraa Khaled pour Middle East Eye - reportage de Jehad Ahmad reproduit et traduit sur le site de France-Palestine.

29 septembre 2025
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