Musique et poésie contemporaines dans le dialogue des arts : introduction au second volet du dossier par Laure Gauthier

Matin (suivre les lignes) © Sébastien Rongier

« Musique et poésie contemporaines dans le dialogue des arts : performances créations radiophoniques et installations »

Le dossier « poésie et musique aujourd’hui » ouvert en septembre 2019 sur remue.net se propose de faire dialoguer le monde « musique contemporaine » et le monde « poésie contemporaine » pour prendre acte d’un renouveau perceptible dans certaines œuvres depuis une dizaine d’années.

Après avoir, dans un premier volet, donné la parole à des compositeurs et des poètes qui dialoguent pour mettre au point un répertoire vocal renouvelé ainsi qu’à des poètes-compositeurs ou des compositeurs-poètes proposant des créations sonores et vocales, un deuxième volet entend donner la parole à des poètes et des compositeurs autour d’un nouveau faisceau de questions :
En quoi le dialogue des poètes (j’entends par là toutes les branches de la poésie : de la poésie écrite à la poésie sonore en passant par la poésie action, la poésie graphique ou encore la poésie numérique) avec la musique dite contemporaine, la musique écrite donc, peut-il renouveler les relations entre les arts et donc les formes poétiques multimédias comme les performances, les créations sonores et radiophoniques ou encore les installations ?

Il ne s’agit plus cette fois de poser des questions sur le statut de la voix parlée ou chantée dans l’œuvre vocale, ni sur le degré de collaboration entre un poète et un compositeur dans la mise au point d’une pièce vocale, mais de comprendre la place que peut jouer aujourd’hui la musique écrite dans des formes poétiques multimédias.

Si la génération des poètes sonores qui émerge à partir de la fin des années 1950 était, pour partie, proche du champ de la musique écrite (on se souvient de l’importance qu’a recouvrée pour Bernard Heidsieck la musique de Stockhausen et celle de Boulez), le lien s’est ensuite desserré. Le champ de la performance poétique s’est davantage liée à la musique punk, rock ou encore pop. Il s’agit ici de savoir si le dialogue avec des musiques écrites dites contemporaines peut renouveler la conception et la pratique de la performance, de l’installation ainsi que de la poésie multimédiale. Les arts tout comme les sciences humaines, ont connu ce qu’on appelle un « spatial turn ». Les poètes, majoritairement issus de la poésie sonore et de la poésie action, ont investi l’espace aussi au sens politique et écologique. Les compositeurs et compositrices se sont également tourné.e.s vers la spatialisation du son. Se détournant du compositeur démiurge qui fixe le temps, au profit d’une musique travaillant sur l’espace, ils mènent aussi une réflexion sur l’ancrage social, politique et écologique du son. Cette musique peut-elle dialoguer autrement avec la poésie d’aujourd’hui, sans la menacer, sans la pousser à devenir libretto ni la soumettre à ses paradigmes sonores ? En quoi l’image poétique à la fois plastique et sonore peut-elle trouver à se réaliser dans des installations multimédias ?

C’est ce que nous interrogerons notamment avec Patrick Beurard-Valdoye, Sereine Berlottier, Frank Leibovici ou encore Valentin Alize, Luc Bénazet et Katia Bouchoueva.

Les deux dossiers seront amenés à évoluer dans le temps sur remue.net. Une partie des entretiens augmentée d’inédits sera publiée par les éditions MF (Musica Falsa) fin 2020.

Laure Gauthier

16 mars 2019
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