Osons
Il est dit que le serpent qui reste sur place n’avale rien.
J’affirme que l’oiseau qui n’ose pas l’azur se morfond dans son nid
que la source qui s’interdit l’ailleurs se borne à tourner lac en rond
que la chenille sans désir d’envol rampera à jamais.
Tous les chemins nous disent
qu’ils soient d’eau
qu’ils soient d’air
ou de terre :
Il y a l’ici
Il y a l’ailleurs
On est d’ici on est d’ailleurs.
Je n’envie pas la pierre qui s’honore de sa mousse.
Je ne plains pas l’errant qui va à l’aventure.
Je ne pleure pas Icare sans danser le douga.
Une terre dit non à la tomate qui dira oui aux pommes de terre
l’herbe pas bonne pour le mouton est délice pour le cochon
l’enfer de telle personne est l’éden de telle autre.
Qui n’a pas la main verte peut l’avoir bleue
qui n’a pas le pied marin peut l’avoir aérien
qui n’a pas le cœur sur la main peut l’avoir sur les lèvres.
À quoi bon la rengaine ?
Les tours-en-rond ?
À quoi bon le sur-place ?
Il n’y a pas de répit
pour qui répète
ce qui l’a privé de répit.
À qui me dit que le chemin de traverse avait coupé la patte de la perdrix
je rappelle que la bonne route avait tranché la tête du ver luisant.
Y a-t-il une habitude qui ne frôle le carcan ?
Y a-t-il un carcan qui ne soit à briser ?
Oser parfois oser prendre un risque
faire une folie ou un pas de côté
oser parfois oser crier haro
changer de cap ou son fusil d’épaule
oser parfois oser crever l’abcès
sortir d’une case ou des sentiers battus
oser parfois oser battre sa coulpe
mettre de l’eau dans son vin
ou du nouveau dans son regard
oser pour ôter la part du peut-être
oser pour ouvrir la porte à ce qui peut être.
Osons un pas hors du ronron. Osons le saut dans les étoiles.
Kouam Tawa