Christophe Segas | Nos corps mouvants



Nos corps / battement perpétuel.

Premières lueurs de l’année,
rêveries initiales.

Nos corps / onde aléatoire.

Nos sourires rappellent que le ciel ne peut venir en tête.
Nos yeux de pierre n’ont de sens que battus par le vent.

Nos corps / étendue de roseaux.

Nous voulons un temps libre d’aspérité -
nous voulons que les nuages et les corbeaux
s’affolent, crépuscules osseux,
où déployer en courtes spirales infra sonores,
puis en volutes amples,
des réels inavouables où résonnent des affirmations
mal déprises de négation.

Nos corps / plage de rochers noirs.

À l’arrière-plan,
les paysages se délitent au ralenti.
Nous sommes ici-maintenant blocs de dur.

Nos corps / torchis sans véritable tenue.

Des orages sifflent comme en plein été.
Les circuits électriques sont à bout de nerfs :
y a-t-il d’autres connexions possibles,
hors le claquement des faisceaux,
hors les exigüités douces amères ?

Nos corps / machine à générer de l’abstraction.

Les plaines sont changées en miroir d’eau :
les moignons de maïs plantent leurs pattes arachnoïdes
dans le sable visqueux,
nos frères oiseaux mastiquent avec application
une ou deux langues de sorcier.

Nos corps / profusion d’identités falsifiées.

Ravissements d’après le rêve : les chiens se sont tus.

Nos corps / espace-temps anonyme.

26 août 2023
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