Prendre suint - 6
Le jour est le point d’orgue ouvrant
le poing de la nuit. Lampe torche
à la main, tu avances entre les baliveaux
dans un brandissement de lin.
Tu t’es levée privée de ma doctrine.
Rien n’empêche le désir de fouiller dans les coins
où deux ou trois boîtes de conserve se lancent
à la poursuite des derniers hérissons.
Comment être mort à soi-même ?
Pour être mort ne faut-il pas
continuer d’être ? Que nos bottes de pluie
brisent la glace
très annelée, collée de boues et de brindilles
à la surface d’une flaque fendue dans la terre,
excitant des vers de vase,
recouvrant la peau suspendue
à la langue pâtissière ;
et dépêchent le ciel tout fripé
par ses hirondelles rondes
de nous tomber,
de ce côté-ci
du sol, sur la tête,
dans le vestiaire du gel !
Qui meurt sinon toi à l’instant où je meurs ?
Quel colosse ?
Et créer – qu’est-ce autre qu’abolir la moindre possibilité de
concevoir quoi que ce soit de remarquable ?
Les raquettes frappent la balle
en regrettant la vie comme il faut.
Les peupliers de l’île frémissent dans un midi flagrant de noir
– seuls berceaux des nôtres. Dans la terre, le moindre hoquet d’iule étouffe les mots sortant de ta bouche : un monde
parle pour toi ;
mais dans le ciel pétrels et cormorans se hâtent vers les falaises,
vers les falaises où l’écho de ta voix fait de chaque fascination
un galet de plus pour l’indignité des lichens.