Christian Salmon | New York Nox/2

Lire le début de New York Nox.


4.

On redoutait l’effet produit par les témoignages de ceux qui avaient vu des fragments humains dispersés dans les rues et sur les murs des immeubles voisins, les images des corps qui tombaient du ciel par grappes entières. Ou en couples, main dans la main comme des « virgules humaines ». On disait : Comme des « virgules humaines ». Une armée de psychothérapeutes était sur place pour canaliser le flot des récits d’épouvante. Il s’agissait, disait-on, d’éviter une véritable « contagion psychique » à New York et dans le reste du pays. On disait : Contagion psychique. La négation de l’horreur de la mort était considérée comme une priorité dans la gestion des conséquences de la « plus grande catastrophe non naturelle » jamais subie par l’humanité. On disait : Rien ne sera plus comme avant ! On disait : Les symboles de l’Amérique. On disait : Pearl Harbor. On disait : Tirer les leçons. L’Amérique en guerre. On disait : Les premiers témoignages recueillis sur place ont été si horribles qu’un engagement à la pudeur a été pris par les chaînes de télévision. On disait : Ce côté spectaculaire était une partie essentielle du programme. On disait : « Unbelievable ! - What’s unbelievable ? - Everything. It was exactly like a movie. » On disait : Beaucoup sont saoudiens. On disait : Le World Trade Center, 350 sociétés, 50 000 salariés, un centre commercial et une gare souterraine au cœur de Wall Street. On disait : Cieling and Visibilité O.K. On disait : Ils sont trois. Ils nous menacent avec un cutter. Nous tombons. Je t’aime. On disait : Sur une chaîne locale les images de la catastrophe défilaient avec la musique du film Raging Bull de Martin Scorsese. On disait : Ils se jettent du haut des tours, l’un derrière l’autre, comme des parachutistes qui sautent d’un avion. On disait : Elle le regardait sans y croire. Il était vivant. Elle pleurait et l’embrassait partout sur le visage. On disait : Al-Hazmi, Al-Suqami, Al-Ghamdi, Al-Shehri, Aziz Al-Omari al-Haznawi, Al-Nami, and so on. On disait : L’islam est sévère pour ceux qui se suicident, ils sont condamnés à répéter leur mort pour toute éternité. On disait : Hollywood semble pétrifié. On disait : Ils changent de nom comme de lieu, ça complique leur identification. On disait : Chaque pelletée de gravats enlevée rapproche les sauveteurs des « gisements de cadavres ». On disait : Gisements de cadavres. On disait : Les images des personnes sautant dans le vide ont disparu des écrans. On disait : Les musulmans vont payer un horrible prix. On disait : Dead or alive. On disait : La production cinéma est tombée dans le coma. On disait : La municipalité de New York a pris contact avec les autorités d’autres pays qui ont eu à faire face à la mort brutale et mutilante de leurs ressortissants. On disait : Brutale et mutilante. On disait : Pour atténuer la douleur des familles les Israéliens enterrent les victimes des attentats dans des cercueils lestés. On disait : Éviter la « contagion psychique ». On disait : Quand on voit Ground Zero d’avion on dirait les griffes du diable. On disait : Les policiers identifient les victimes grâce aux cartes de crédit et aux téléphones portables. On disait : Les victimes les plus proches des points d’impact ont été « vaporisées » par l’embrasement du kérosène. On disait : Rien ne pourra en être retrouvé ou séparé des cendres des bâtiments. On disait : Censurés également les témoignages de ceux qui ont vu des fragments humains dispersés sur les murs des immeubles alentour. On disait : On va les « enfumer pour les faire sortir de leurs trous et les faire courir » (smoke them out and get them running). On disait : Ticket to Ride des Beatles et Imagine de John Lennon ont été interdits des ondes. On disait : Nous avons totalement échoué à assembler les pièces du puzzle, avait reconnu Bob Graham de la CIA. On disait : « Continuez à vivre ! Allez au restaurant ! » On disait : On voit des employés rejoindre leurs bureaux situés dans les plus hauts buildings avec, sur le dos, des petits parachutes. On disait : Un grand peuple s’est levé pour défendre une grande nation. On disait : Au comptoir du Shuckum’s il a vidé cinq vodkas tout en bavardant avec un compère, sans doute Al-Shehri, lequel descendait des cocktails au rhum. On disait : Le 6 août 2001 les services secrets avaient averti le Président que des avions pourraient être détournés par des membres d’Al-Qaida. On disait : Un troisième homme s’absorbe dans des jeux vidéo. On disait : Mohamed Atta n’a laissé que de bons souvenirs chez nous. Il était aimable. Ses dessins étaient très précis, très propres. On disait : Lorsqu’il a appris la nouvelle le Président est resté de longues minutes plongé dans un livre pour enfants. On disait : On ne pourra plus montrer dans un film un jeune broker qui carbure à la cocaïne tout en faisant son million de dollars... Cela n’aura plus aucun sens. On disait : America will never dream (Ben Laden). On disait : We’re going to ask for a lot of information, all types of questions. We’re going to want names, addresses, any description you can give us, their location in the building. We would like to know what they were wearing yesterday, if you know any scarring they had. We would like the name of their doctors and the name of their dentists. On disait : Press conference. Any question ? No more ? O.K. That’s all ! On disait : That’s all ! C’est tout.

5.

L’image 1 est agrandie 12 fois
avec PSP interpolation « bicubic »
saturation = 30
à partir de la photo originale
by Richard Crew
No further editing.
Pas d’autre édition.

Agrandissez
L’image 2 est agrandie 14 fois
avec PSP interpolation « bicubic »
rotated 180 degrees
gamma = 2
à partir de la photo originale
by Richard Crew
No further editing.

Agrandissez encore
L’image 3 est agrandie 18 fois
avec PSP interpolation « bicubic »
saturation : 40
clarify = 5
gamma = 0.85
à partir de la photo originale
by Richard Crew
No further editing.

Éditer celle-là
Nous avons eu très peu de pixels à travailler
dira le technicien
very few pixels to work
dans les images originales
comme vous pouvez voir
les images originales sont remises à la côte en utilisant
PSP « Pixel resize »
à hauteur de 640 pixels
« Pixel resize » does not change
aucun détail
« Bicubic » interpolation offre
la meilleure définition
La couleur d’un pixel dans une image
est donnée
par la moyenne mathématique des 16 pixels adjacents.
Peut-on lire sur SkFriends.com
No further editing.
Pas d’autre édition.

De loin, on dirait un linge qui tombe lentement sur un fond de lignes verticales

Agrandissez
Ici on dirait un oiseau
mort photographié dans sa chute

Agrandissez
Maintenant on voit une bannière
composée de bandes verticales
avec un motif incrusté au centre,
une feuille comme sur le drapeau canadien,
un blason,
inscrit dans la mémoire de la nation.
Une possible blessure.
Dans la mémoire de la nation

Agrandissez encore
L’image se décompose
en un puzzle transparent
composé de petits carrés
lumineux
spectre de lumière,
au centre duquel
un homme apparaît.
Distinctement
il porte une chemise
légèrement colorée
Le haut a été probablement déchiré
quand il a été blessé
S’il a été blessé
Il est peu probable qu’il ait été déchiré
par la pression de l’air
au cours de la chute
car la photo a été prise
au début de sa chute,
avant même qu’il n’ait pu prendre
assez de vitesse
pour provoquer la déchirure
Je n’ai pu trouver aucune indication significative démontrant que l’homme portait
« un tee-shirt orange sous sa chemise blanche »
comme cela est mentionné dans l’article d’Esquire
à une exception près :
une petite zone orange
sur le dos de l’épaule gauche.
À l’endroit de la possible blessure
son bras est légèrement replié
sa jambe gauche fléchie
tandis que la droite est bien allongée
sa chemise sort de son pantalon
ses chaussures sont toujours à ses pieds
la position de son corps
n’apporte aucune information
sur ce qui est en train de lui arriver
Si on renverse l’image à l’horizontale
on voit un baigneur qui nage sur le dos en battant des pieds.
À l’envers, c’est Batman fonçant dans les airs
debout,
on dirait un homme en train de faire un footing
ou de danser
négligemment.
Mais il ne danse pas.
Il tombe.
Derrière lui, les verticales de la façade encadrent et soulignent sa chute.
Personne ne sait qui c’est.
The Man Falling.
L’image a été reproduite à la une de tous les journaux.
Des millions d’exemplaires.
Des milliards d’yeux dans le monde l’ont vue.
Puis elle a disparu.
Cette photo est une flèche humaine tirée contre le vide.
He departs from this earth like an arrow, a écrit le journaliste d’Esquire.
L’image appartient à une séquence
de 9 prises
« fifteen seconds after 9:41 A.M. 
on September 11, 2001
a photographer named Richard Drew
took a picture of a man falling »
,
peut-on lire sur la légende.
A man falling through time as well as space.
Personne ne sait qui c’est.
The Man Falling.
Qu’est-ce qui fait qu’une image
entre dans la conscience collective ?
Comment une image devient-elle icône ?
La photo se distinguait des autres
à cause de sa verticalité
et de sa symétrie
,
avait écrit le journaliste d’Esquire.
La silhouette d’un homme
dans la verticale des tours
exactement au point de jonction
entre les lignes de brillance
foncées à gauche
(tour Sud)
claires à droite
(tour Nord).
Verticalité
Symétrie
Beaucoup de gens ont sauté
Many people jumped.
Perhaps hundreds.
No one knows.

Ils ont sauté des bureaux de Marsh & McLennan,
une compagnie d’assurances
de ceux de Cantor Fitzgerald,
A bond-trading company
du restaurant Windows on the World,
aux 106e et 107e étages.
Ils sautaient des quatre côtés de la tour Nord
à la vitesse de 150 miles à l’heure.
Ils mettaient dix secondes pour toucher le sol.
`
Plus de deux cents au bas mot,
a calculé USA To-Day.
Une victime sur six.
Ils tombaient
through time as well as space.
Leurs corps
ponctuaient l’espace vide
et le temps arrêté
« comme des virgules humaines ».
They struck the pavement with such force
that there was a pink mist in the air.
(The mayor reported the mist.)

Ils cognaient le sol avec une telle force
qu’il y avait une vapeur rose dans l’air.
C’est le maire qui a parlé de la vapeur.
Les vies se vidaient de leur vie
pour devenir image.
Une forme d’embaumement.
One never knows when history is made.
L’histoire venait à lui sous la forme de ces corps
qui tombaient.
Elle remplissait son cadre.
Ce n’était pas à lui de les refuser.
Plus tard leur image s’illuminerait sur les écrans
des ordinateurs,
des Ames Numériques,
des anges digitalisés,
qui tiraient de leur substance passée
un dernier éclat blanchâtre,
phosphorescent
et s’abîmaient
en codes numériques,
en pixels,
poussières de vie,
étoiles éteintes,
stockées dans les disques durs.

The Man Falling
n’a jamais été identifié.
Malgré les recherches
il est le Soldat inconnu
d’une guerre dont nous n’avons pas encore vu la fin,
a écrit Tom Junod dans le magazine Esquire
le 11 septembre 2003,
are our most intimate connection
to the horror of that day.
The picture is his cenotaph
,
la photo est son tombeau.

L’image est éditée par DIRRER pour SkFriends.com
avec le maximum de detail possible.
And to show possible wound
Une Possible blessure.
No artistic rendering.
Aucun rendu artistique.
Magnification 10x,
dit la légende,
Magnification.

6.

Devant eux, sur une multitude d’écrans, le ciel de New York déroulait son immensité bleue ; sa clarté d’avant-attentat. L’avion entrait au ralenti dans le champ, le Boeing 727 d’American Airlines contournait la première tour en flammes, derrière laquelle il disparaissait, avant que la deuxième tour ne s’enflamme à son tour comme une boîte d’allumettes. Des milliers de morts. Mais on n’en voyait rien à l’écran. Que valent deux mille sept cents morts si vous ne pouvez identifier un visage, pensait Kirk. Les images ne montraient, pas les hommes. Juste une trajectoire, un choc. Une seule caméra. Un plan à la composition géométrique.
Verticalité.
Symétrie.
L’absence de bruit donnait à ces images une forme d’éternité, la fixité d’ images peintes quoiqu’en mouvement. Elles semblaient sorties d’un tableau hyperréaliste américain plutôt que d’un film-catastrophe. Elles évoquaient le mystère des choses inéluctables. Tout semblait se passer sous le regard impassible d’un dieu Invisible. L’avion tel un scalpel guidé par une main surhumaine découpait en la traversant la fine ossature du gratte-ciel. Un acte chirurgical. Attentat sans visage. Acéphale. Aucun appel, aucune revendication. L’attentat avait l’évidence d’une catastrophe naturelle. Il produisait la stupeur et non l’indignation. L’attentat n’était pas seulement parfaitement exécuté, il n’était que ça : exécution. Achèvement. Il s’épuisait en arrivant. S’abolissait en se réalisant. Il ne défendait aucune cause. Il ne revendiquait l’indépendance ou la souveraineté d’aucun peuple. Il était déjà tout cela. Autonomie. Souveraineté. Indépendance.
La lumière qui jaillit du ciel. Un clip, une éclipse. Cela n’est pas possible ; des forces mystérieuses étaient à l’œuvre. L’invisible se manifestait. Un ballet abstrait. Non pas de masques mais d’axes. Les abscisses et les ordonnées. Une lutte entre deux dimensions. La verticale et l’horizontale.
Verticalité.
Symétrie.
L’exécution de cette figure prenait la forme d’un châtiment mathématique.
Ici les foules pouvaient se rassembler dans la stupéfaction.

En face d’eux, sur un mur d’écrans, des images numériques, une myriade de points noirs suivis de traces lumineuses, des lignes grises qui tremblotaient, des têtards lumineux se déplaçaient comme des voitures tampons sur une piste encombrée, se répandant en tous sens, latéralement et verticalement. C’étaient les images de l’intérieur des tours enregistrées juste avant l’attentat. Les dernières images des dernières minutes. Images banales. Devenues archives. Dans les couloirs et les ascenseurs. Sur les escalators gris. Métallisés. Des hommes et des femmes. Des chiffres. Des points. Des flux qui tantôt se séparent, tantôt se rejoignent. Des circuits de particules aux contours rendus flous par le vitesse. Petites cellules transparentes, des lucioles. Hémophilie des formes. Des foules. L’avenir appartient aux foules, pensèrent Kirk et Hitchkock presque simultanément. Mais Hitchkock ne pouvait plus parler. Il avait rejoint Kirk au royaume des choses muettes. Les mots parlaient en lui. Il y avait de la colère dans ses pensées. Les mots le chevauchaient. Ils voyaient clair. Lui non. La foule avait pris la place des corps. It is our lives and minds that are occupied now. This catastrophic event changes the way we think and act, moment to moment, week to week, for unknown weeks and months to come, and steely years... La foule avait éclipsé les corps. Il y a longtemps déjà. La peinture moderne avait commencé ce travail d’élision. Elle s’était détournée de la figuration pour ne s’intéresser qu’aux lignes, aux points, aux couleurs. Elle avait perdu son caractère narratif. Elle montrait le chemin. Les foules folles. Viscérales. Flux de foules. Le cinéma ne connaissait que les corps. La vidéo les faisait disparaître. La vidéo avait été inventée pour les foules.
Sur certains écrans on voyait les flammes gagner le cadre, elles s’approchaient, léchaient les bords de l’objectif, enfumaient l’image ; on va les « enfumer pour les faire sortir de leurs trous et les faire courir » (smoke them out and get them running). Les flammes mettaient le feu aux webcam. Elles fonçaient sur elles. L’image s’obscurcissait, le son grésillait. Images et flammes fondues dans le même feu.
Les deux hommes passèrent à travers un lourd rideau d’insonorisation dans un sas qui débouchait sur une porte de sécurité. Kirk la poussa et entra. Il fut plongé aussitôt dans une obscurité bruyante. Des voix dans la nuit, des sirênes, stridences d’incendies... Rumeurs. Tumulte. Sonneries. Au bout de quelques secondes, l’œil s’accommodant à l’obscurité, un rayon laser violet apparaissait le long des murs qui éclairait de toutes petites photos d’identité. Halo pâle sur les visages des disparus.
Voiles sur le front des innocents.
Vies trop tôt interrompues.
Du faux plafond, garnie de haut-parleurs, parvenaient les voix enregistrées pendant la catastrophe. Voix d’outre-tombe. Tous ces gens. Aujourd’hui morts.

— Quelque chose brûle au Trade Center.

— 78e étage. Tour Nord. Car Number 81-A. Pouvez-vous envoyer quelqu’un pour ouvrir l’ascenseur ?

— Un homme dans un fauteuil roulant coincé au 27e étage. Vite !

— Here it’s Tonny : je suis enfermé dans l’ascenseur ; des débris et de l’eau entrent et la fumée...

— Ne laissez monter personne ici. Il y a trop de fumée. Big smoke !

— L’air frais est en train de manquer. Je n’exagère pas.

— Je sais que vous n’exagérez pas.

Des voix implorantes sur le réseau. Détresse. S.O.S. Sortant des douches sonores. Voix errantes dans le labyrinthe. Faisant irruption dans les appartements désertés.

— Heather, c’est moi. Papa. Je ne sais pas si vous regardez la télé. Nous avons une explosion au WTC.

— Une chose terrible est arrivée, Anthony, some very sick people.

— Veux-tu me faire plaisir, Anthony ? Tu es l’homme fort de la maison. Tu aideras Maman. Okay ?

Des appels des familles inquiètes. Des gens qui ne se voyaient presque jamais. Mais là. Nombreux, innombrables, les appels de ceux qui étaient coincés dans un ascenseur, immobilisés entre deux étages, perdus dans les étages effondrés. L’histoire triste des morts solitaire et des derniers mots (the sad story of lonely deaths and last words).
Avalanche de voix sur vos têtes.
Voix veuves des personnes déjà plus présentes
errantes dans les appartements vides
sortant des répondeurs
dans les chambres aux lits défaits
parlant seules aux meubles muets
et aux rideaux tirés,
clic-clac des répondeurs.
Des cris étouffés par une main posée sur le combiné.
Des conversations interrompues par un bruit mat.
Suivies de tonalités lancinantes qui se répétaient inutilement.
Dying words.
Tombeau des voix qui nous sont chères
Derniers mots des mourants.
« Là d’où tu es »,
la douceur horrible des adieux
et tout ce silence énorme entre les mots
tout ce désert de mots morts
la douleur intime des gens
la douleur réelle des gens
« Là d’où tu es... »

Post-scriptum

L’histoire de Kirk est authentique. Elle est racontée dans le New Yorker du 24 septembre 2001.
Arrivé parmi les premiers sur les lieux à 9h41, Richard Drew, photographe à l’Associated Press, a photographié les corps en train de tomber du WTC. Sa photo, The Man Falling, a fait l’objet d’une vive polémique aux États-Unis. L’histoire est racontée par Tom Junod (Esquire Magazine, September 2003, Volume 140, Issue 3).
Les voix du Mémorial sont des extraits d’enregistrements d’appels reçus par les autorités du Port de New York pendant la catastrophe et qui ont été rendus publics après une bataille juridique menées par les grands médias contre les familles des disparus. Les médias ont gagné cette bataille.
Le Mémorial est imaginaire. Le véritable Mémorial est encore sur les planches à dessins de Michael Arad, un jeune architecte dont le projet a été retenu à l’issue du plus grand concours d’architecture jamais lancé. Son projet s’appelle : Reflecting Absence (Reflet d’absence). Le choix définitif a été retardé par de multiples controverses et débats suscités par l’organisateur de la compétition, le Lower Manhattan Development Corporation. Cet organisme chargé de coordonner les travaux de reconstruction du WTC a reçu 5201 projets, provenant de 63 nations, pour ce concours dont le budget a atteint près de trois millions de dollars. Ce Mémorial s’inscrit dans le projet architectural du promoteur Larry Silverstein, qui comprend notamment cinq tours alignées en ordre décroissant autour du monument. « Cet endroit symbolisera le souvenir de la perte immense mais aussi du grand courage », a déclaré le gouverneur de New York, George Pataki, évoquant « un événement qui pour beaucoup d’entre nous restera toujours incompréhensible et incroyable ».

1er avril 2006
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