François Monaville | Blind test 1

François Monaville présente son projet :

« Pour réaliser ce projet, j’ai sélectionné avec G trois ambiances sonores d’une durée de trois minutes. J’ai fait écouter ces trois ambiances àonze personnes en leur demandant de me décrire ce qu’elles entendaient. J’ai àchaque fois enregistré les commentaires de chaque personne. J’ai ensuite retranscrit et adapté tous ces propos pour créer une série de onze textes.

Chaque texte se compose de trois parties. Le premier toutefois en comporte quatre. Lors de la première séance d’écoute, K a par inadvertance écouté un quatrième enregistrement et a continué àme décrire ce qu’il entendait. Estimant ces propos supplémentaires intéressants, je les ai inclus dans ce projet.

Concernant les retranscriptions, j’ai àchaque fois repris dans l’intitulé du texte la première lettre du prénom de l’auditeur, suivi du nom de la ville où s’est déroulée la séance d’écoute. Une partie de ces séances s’est déroulée àMoscou où je travaillais, l’autre àVirton et àLiège lors de mes retours en Belgique.  »

Lire d’autres textes de François Monaville.


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K – Liège

1.

j’en
tends
un avion
qui décolle

j’en
tends
de
la pluie
mais ça
pourrait
être aussi
quelqu’un
qui a du mal
àdéglutir

c’est
un peu
sinistre

c’est
comme
si je me
trouvais
dans
le sous-sol
d’une
gare avec des
trains
qui passent
àl’étage

j’en
tends
un son
caverneux

un
son
rempli
de
réverbérations

d’échos

un
son
trafiqué

toujours
ces bruits
de pluie

j’ai
l’impression
que
mes
vêtements
sont trempés

2.

je
suis
maintenant
dans le cabinet
d’un dentiste

c’est
sans
doute
àcause
des grincements

j’en
tends
des voix
mais ...

je
ne
sais
pas

j’en
tends
des voix

mais
je n’arrive
pas
àcomprendre
ce qu’ils disent

ce
sont
peut-être
des anglais
ou des français

j’en
tends
aussi
les voix
des gens
assis autour
de moi

j’en
tends
des voix
d’hommes
de femmes

on
dirait la
déformation
d’un bruit
de train

j’en
tends
une ex
plosion
le tonnerre

j’ai
l’impression
que quelqu’un
se moque
de moi

j’en
tends
des sons
de cloches
de carillons

ça
ne m’évoque
pas grand-chose

j’en
tends
de nouveau
les sons à
l’intérieur
du bar

3.

j’en
tends
un air
d’opéra

on
dirait
du kabuki

oui
ça doit
être ça

j’en
tends
des tambours
des percussions
des notes de piano

je
ne fais
que décrire

je
n’ai pas
d’images

je
continue
àdécrire

j’en
tends
des voix
sur des
airs de
kabuki

j’en
tends
des bruits
de moteur
de klaxons

je
revois
des images
de chapeau
melon et bottes
de cuir


des
acteurs
de kabuki
sont en train
de poursuivre
john steed
àbord
d’une
jeep

j’en
tends
des
chants
tribaux

des
bruits
de klaxons

un
groupe
d’indiens
danse
en plein
centre
ville

4.

ah
mais
j’en
tends
ta voix
maintenant

tu dis
on y va
mais on
ne sait
pas où

tu
parles
avec
quelqu’un
mais...

on
n’entend
pas ce que
te dit cette
personne

on
a l’impression
qu’elle ne
veut
pas
te
répondre

que
tu réponds
àsa place

tu
interviewes
quelqu’un
qui ...

je
pense
qu’il fait
froid et que
cette personne
a une grosse écharpe
devant la bouche

on
ne comprend pas
ce qu’elle
te dit

tu
parles
peut-être
avec un chien

tu
lui poses
des questions

ça
ressemble
àune étude
de marché

je
sais

c’est
quelqu’un
qui se dirige
vers un supermarché
mais qui ne sait
pas ce qu’il
veut

il
n’arrête
pas de t’en
parler et tu
as été obligé
de le museler


àsuivre…


Polaroid de Laurence Skivée

24 octobre 2010
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