L’Enéide de Virgile, chant I, 254-283 par Jordane Berot
Il lui sourit, le semeur d’hommes et de dieux,
De sa figure qui calme ciel et tempêtes ;,
D’un baiser il effleure sa fille, lui parle de la sorte : ,
« N’aie crainte, Cythérée, ils ne vont plus bouger, les destins,
Des tiens. Tu la verras, la Ville, les murailles promises ,
De Lavinium. Tu le tiendras bien haut, vers les astres,,
Enée Grand-Courage : mes décisions ne fluctuent pas. ,
Ce fils tien (il faut que je parle plus au long, tant te rongent,
Les soucis, que je fasse défiler le détail des destinées),
Guerre terrible il mènera en Italie, peuplades sauvages,
Il écrasera, leur imposera manières et murailles. ,
Ainsi le verra-t-on sur le Latium régner trois étés,,
Et sur les Rutules soumis passer trois hivers.,
Puis le petit Ascagne, lui qui maintenant du surnom d’Iule ,
Est affublé (il était Ilus tant qu’à Ilion tout allait bien),
Le temps de trente grands tours dans la courbe des mois, ,
Il exercera le pouvoir ; le séjour de son royaume, de Lavinium,
Il le déplacera vers Albe-la-Longue, solidement la fortifiera.,
Là, trois cents années bien pleines, règnera,
La race issue d’Hector. Alors une reine, une prêtresse,,
Lourde de Mars, Ilia, donnera en une fois double descendance..,
Après quoi, protégé par l’abri fauve de sa louve nourrice, ,
Romulus continuera la lignée1, pour Marsville bâtira,
Des murailles, et de son nom « Romains » il les nommera. ,
Pour eux je ne fixe de limite ni dans les actes ni dans la durée : ,
Un empire sans fin : c’est mon cadeau. Mieux : Junon la rugueuse,
(Pour l’heure elle courbe sous la crainte terres, mers et ciel),
Prendra de meilleurs avis : à mon exemple elle va les choyer,
Les Romains, ces maîtres de toute chose, ce peuple policé. ,
Ça me plaît comme ça. ,
1. On peut le comprendre aussi : « accueillera le peuple » comme allusion à l’asylum
On retrouve l’ensemble du chantier Virgile ici.