Diogo Maia | La gravure d’Alexandre (#1)
Avant de tomber, je m’imagine déjà aquatique, homme d’un chœur, un homme, non, pas un homme, un trapèze. Et lorsque je me place, par ma cécité, à l’intérieur de la figure, j’entends coasser, non, coincer, ma tête dans ce trapèze clos :
cabeça, tête grade, dans la grille en attente.
Avant d’être aveugle, tu sais, avant de tomber dans le noir, je lisais les Grenouilles, ça sautait à l’ail et à l’aise, je ne comprenais pas ce que le bruit disait, coinçait.
Et au moment de tomber aveugle, j’ai vu une gravure : je l’avais achetée à Marseille dans une boutique, Rue de Rome. Cette image illustrait Alexandre en train de plonger. Et lui tournait dans ma tête d’aveugle et je me disais :
Un jour je vais écrire sur lui, sur son aveugle envie de grandeur.
Alexandre dans la gravure plongeait dans la mer, et dans la mer il voyait cet autre monde qu’on ne voit jamais : sa cage était transparente, ses doigts traversaient les grilles, son scaphandre était lourd et ressemblait à un poisson en mutation.