Hugo Pernet | Poème pour des filles

en haut à gauche
seul, en haut à gauche

sont à moi ces lettres, ce collier
de lettres
leur sonorité dans l’air

à moi leur façon de se poser
sur la ligne

éteins cette lumière
avec l’eau, faiblesse
éteins ce feu avec de la faiblesse

ton pied
dont les orteils partent dans les deux sens

si je le voyais
petite araignée, cours te cacher

— 

qu’est-ce que
la réalité

j’avais
tort, ok, l’hermine
glisse dans son terrier

jamais vu ce noble animal

mais je sais qu’il existe et
c’est ce que j’appelle la réalité

— 

les lettres
s’assemblent, docilement
bonnes bêtes
de retour à l’étable

qu’est-ce que ça va donner
cette neige

une phrase allongée
dans la plaine
le clocher du village

luisant
comme les fesses d’un cheval

— 

rien sur rien
la beauté tombe des mains

avec le cerveau, tremblant
dans l’argile froide

— 

merde,

tout est cassé
entre les filles et moi

il n’y a rien de plus lent
que la lumière

et je sais que toi seule
peux me voir

car nos cœurs sont comme du cristal
séparé au laser

comme la tasse et le pichet
dans un tableau de Zurbarán

les métaphores sont des pommes
pour les chevaux

donnons-leur à manger
quand il n’y a plus rien à dire

28 octobre 2017
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