Granits - 7


LA PÊCHE D’UN AUTRE JOUR


Les pécheurs lâchent la lamproie pour l’omble. Nous
prêchons et prêchons.
Ne désirez rien qui n’ait l’effacement pour visage ;
tendez toujours vers le médiocre ; à
la réputation préférez l’humilité noire.
Ne pas rester immortels.

Sur les chaises pliantes
, à portée de main des glacières,
on en vient à tant abominer qu’on ne veut que du bien.


DU COIN DU CIEL


Les sangsues s’accrochent à nos jambes
comme des anges porteurs de cors. Nous nageons dans la rivière.
Étendu sur le dos, j’entrevois
les tourelles du manoir pointer hors des branches
de ma tête : on entend des voitures grimper sur le chemin,
on va recevoir à dîner.
Le jour décline ; tu prends ma main dans la tienne.
Remonte des embâcles une odeur de menthe poivrée.
Désormais nous volons dans la berlue des anges.


L’ATTENTE


Viens – rumeur du moindre sol – soulager son corps
de l’arc-en-ciel où l’aimée para de son cri
l’effraction des arbres. L’orage
n’a pas abrité la flamme dans l’âtre pour le tenir
captifs de ses fautes
mais pour exaucer notre trouble.
On a beau faire : on marche toujours en deçà
des œufs d’insectes en grappes sous les feuilles.
Toujours nous écartons des sentiers pour le ciel.

12 mai 2024
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