On reconnaît à cela les poètes qu’ils s’approchent lentement de leurs lèvres. Comme la rumination, la poésie exige le concours de nos quatre cerveaux...
Anges, mésanges : mécompte du ciel. Les enfants jouent autour de la nappe en papier. Combien ce sachet de dragées peut-il contenir de tristesse, pour qu’on se soit donné à dix mille ans de là la mort, ou le mot ?...
La poésie fait la renommée des êtres. Elle ne fait même que les renommer : seul est ce qui est dit. La poire que j’écris n’est pas celle que je dis que je mange...
Quelle est la forme géométrique d’une penne de pouillot, d’un regard ou des tiges ramollies par l’eau, venues s’agglomérer sur la paroi d’un vase guilloché ?...
Où notre corps se tient-il, sinon tout au bout de nos sensations, là où l’intelligence n’est qu’une ombre portée depuis de lourds volumes oubliés sur des escarpolettes ou des guéridons en fer forgé ?...
Quatrième livraison. Le poème ne fixe rien de ce que nous savons voir : il n’est que le pense-bête – de quelque manière qu’on prenne cette expression – de ce que nous ne saurons jamais ne pas avoir vu...
Troisième livraison. Quelque part meurt un monde. Ses plantes agonisent dans la siccité des loams et des prairies. Ses animaux hurlent dans la nuit qui les prend. Ses livres tournent aux reliques...
Deuxième livraison. Le soir exige la joie de la houe. C’est dans ces moments si particuliers du soir que sont l’été, les os ou les guêpes, qu’écrivent les poètes. La poésie nous tient lieu de famine...
Première livraison. Suint, la graisse que sécrète la peau du mouton, et qui se mélange à la laine. Le suint est le dernier territoire de la chair vive, d’emblée basculé dans l’existence technique du cérémonial humain...