déplacer, se déplacer, raconter
Ce mois d’avril les textes sont venus à nous d’il y a très longtemps, en nouvelle vie
Marie Cosnay et Danielle Carlès proposent une nouvelle traduction de L’Énéide de Virgile. L’ensemble du dossier est ici, ce projet de traduction collective et les participantes sont présentés par Marie Cosnay. Danielle Carlès nous expliquait et racontait, le 18 mars, « Le chantier de l’hexamètre ».
Si vous voulez découvrir la liberté de la traduction comme écriture, lisez le chant I traduit par Danielle Carlès, Vénus :
« [...] il se met en route,
accompagné du seul Achate,
dans chaque main brandissant un épieu
au large fer.
Or sa mère au beau milieu de la forêt vint
à leur rencontre,
portant le visage et l’allure d’une jeune
fille, et les armes d’une jeune fille
de Sparte, ou comme une de Thrace,
qui éperonne ses chevaux,
Harpalycé, pour gagner au vol la course contre l’Hèbre.
Car elle avait, selon leur habitude,
suspendu aux épaules un arc à sa mesure,
chasseresse, et laissé
ses cheveux flotter dans le vent,
nue aux genoux, tunique fluide
troussée d’un nœud. »
puis par Marie Cosnay, Une mère ? :
« Il va, accompagné du seul Achate
Et fait jouer dans sa main deux bâtons au large fer.
Sa mère au milieu de la forêt se tient face à lui,
Elle a le visage d’une jeune fille et le style et les armes d’une jeune fille
De Sparte ou d’une Harpalyce de Thrace qui fatigue
Les chevaux et devance à la course l’Eurus qui vole.
Elle a suspendu à son épaule, comme d’habitude, l’arc facile,
Chasseresse elle a laissé sa chevelure se répandre aux vents.
Nue jusqu’au genou, elle a relevé d’un nœud les plis fuyants de sa robe. »
On le sait par l’épopée du Général Instin, les textes réactivent les fantômes venus de loin : Il est passé par ici. Il repassera par là, Raymond Penblanc trace le Général Instin parti sur la route Napoléon (à noter aussi dans vos agendas parisiens : le festival Instin Belleville 2 qui aura lieu du 30 mai au 8 juin avec une trentaine d’invités)
et nous suivons les traces persistantes de la proposition de Sébastien Rongier qui a intitulé Une disparition la photographie dont nous donnent une version :
Roland Cornthwaite, di( )paraître
Catherine Pomparat, Un drapeau de choses trouvées
Clara Regy, Le « pourquoi » du banc !
Cécile Wajsbrot est partie quelque temps dans les montagnes suisses y expérimenter la familière étrangeté, l’étrange familiarité, elle a appelé sa nouvelle chronique Survie en milieu hostile :
Atomkraft, nein danke ! (11 avril 2014) : « Aujourd’hui, le territoire suisse compte environ 300.000 abris privés et 5100 abris publics, l’ensemble couvrant 114% de la population, un record mondial absolu. »
Instant de grâce (18 avril 2014) : « Comme s’ils étaient faits l’un pour l’autre, comme si la ville avait attendu leur présence pour s’animer. Ils venaient d’Érythrée, ils avaient fui la prison, la torture, l’enrôlement, et avaient convergé là, en Suisse, dans cette ville tranquille. »
France/Japon : 2 À 1 (24 avril 2014) : « Le 10 août 1821, le monument est inauguré en présence de la fleur de l’aristocratie européenne, la cérémonie étant perturbée par les libéraux et les progressistes qui considèrent, non sans quelque raison, ce monument comme une glorification de la réaction. Qu’en pensent les touristes qui se pressent aujourd’hui pour photographier la bête à l’agonie éternelle qui gît au bord de l’étang ? »
Au sommaire du printemps de la revue
dans le cahier de création
déviation continue, un poème de Raluca Maria Hanea
Paura degli occhi, un poème de Carmen Gallo, poète napolitaine, traduit de l’italien par Clément Lévy
Le geste de Marta de Beatrice Monroy, un texte de vocation et d’engagement, nés au cœur d’une révolte populaire contre la mafia, à Palerme, en Sicile, et contre tous clichés, traduit de l’italien par Laurent Grisel et Andrea Inglese, et qui a paru, même jour même heure, sur le site nazione indiana
dans le cahier théorie, critique
Ce qu’on arrache à l’imprononçable, un entretien d’Armand Dupuy avec Mathieu Brosseau
L’art n’est pas libre, il agit, un article de Laurent Grisel à propos du livre d’Alfred Döblin
Il faut qu’une bouche soit ouverte ou fermée !, un article de Serge Meitinger à propos du roman d’Alban Lefranc Si les bouches se ferment
nous avons lu, lisez donc
avec Jacques Josse, Rien (qu’une affaire de regard), un roman de Philippe Annocque, les Lettres de Neal Cassidy et Le ciel & autres contes d’Anne-Marie Beeckman
avec Marie de Quatrebarbes, Le Fils de Judith de Marie Cosnay
avec Sébastien Rongier, les Écrits radiophoniques de Walter Benjamin
avec Florent Viguié, Devenir Carver de Rodolphe Barry et les lettres (1944-1950) de Neal Cassady.
Pierre Autin-Grenier a disparu, nous l’aimions, nous l’aimons
« Je sens qu’une grande muraille de sable en moi sans cesse avance qui, insensiblement, d’un mot l’autre bientôt me portera aux rives de l’absolu silence. Aucune terre, disait-il encore, n’est jamais vraiment gagnée sur la mer. C’est folie de vouloir prendre la parole pour ultime refuge, quand alentour tout appelle avec force à se taire. Droit sur les marches du perron, comme décidément seul au centre d’un désert, le regard fixe tout au loin égaré par travers ses étranges visions qu’agitent ça et là d’invisibles musiques… »
Jacques Josse l’évoque, « Il écrivait, racontait, tissait des liens entre un point et un autre sur une carte et pressentait d’emblée que c’était dans cet entre-deux que se cachait l’aventure ».
Et dès le 9 avril Sébastien Rongier a annoncé la huitième nuit remue.net, voilà déjà une date, un lieu, des noms
on s’y rendra, les textes, les paroles, les rencontres nous déplaceront…
En attendant, venez nombreux à la rencontre du vendredi 16 mai avec les éditions Ypsilon, une soirée organisée par Lucie Taïeb.