Le goût d’Edo
Essayer de réaliser les recettes de Cent curiosités au Tôfu, c’est faire revivre le goût d’Edo. C’est une banalité à dire, mais c’est la vérité. Les goûts d’Edo, ce sont des goûts simples, parfois à la limite du perceptible. Cela demande de rechercher avec notre palais, habitué à des goûts trop forts, « grossiers » parfois, des nuances subtiles, et c’est aussi cela faire l’expérience de manger dans le goût d’Edo.
Et c’est pareil pour les cuisiniers, en fait : ce que j’essaie de faire ici n’a sans doute presque rien à voir avec ce que les gens d’autrefois mangeaient.
Je dis cela parce que, plus le goût ou l’assaisonnement est simple, plus la qualité de chaque ingrédient aussi bien que les ustensiles qu’on utilise sont primordiaux.
Le but n’est évidemment pas de reconstituer le goût d’autrefois (impossible par définition). J’essaie de refaire ces recettes par pur plaisir d’essayer, comme un jeu. Mais cet essai approximatif me fait saisir la différence qui doit exister entre leur palette des goûts et la nôtre.
En fait, quand on est passé une fois par ce goût d’Edo, on en vient à se demander comment on peut encore manger à la « mayo-ketchup » (bien que je n’aie rien contre ce goût-là non plus, bien évidemment). C’est comme quitter un arbre ombragé pour sortir en plein soleil, les goûts d’aujourd’hui paraissent trop « vifs ». Ça donne envie de se laisser aller à des analogies plus ou moins vaseuses : « Ah, c’est comme la différence entre un délicat lavis oriental et une peinture à l’huile… », ce genre-là. À mon avis, l’écart est même plus important qu’entre haute gastronomie et cuisine industrielle, car il ne s’agit pas d’une variation en « qualité/prix », mais du concept même du goût.
Après ce joli discours, j’espère que mes essais ne paraîtront pas trop « fades », mais bon. Quoi qu’il en soit, la plupart de ces recettes sont relativement faciles à réaliser, et j’ai eu peu de ratages (parce que par définition il est impossible de dire si c’est raté ou pas).