Ma science-fiction
Lecture/conférence d’Isabelle Stengers (collectif Dingdingdong).
« La Science fiction comme exercice spéculatif : que sera notre monde dans quarante ans ? Voilà une question à ne pas poser aux spécialistes des sciences dites humaines, ce n’est pas de la science, diront-ils. Mais c’est une bonne question si elle porte sur les futurs dont le présent est porteur, ceux que le présent nous rend capables de fabuler aujourd’hui. Et si la littérature de science-fiction désignait (entre autres) ce que les sciences humaines s’interdisent, au nom du sérieux scientifique : envisager le présent à partir des possibles dont il est porteur ? Et si les écrivains de science-fiction faisaient exister, à chaque époque, les mondes auxquels nos imaginations peuvent donner consistance ? Ressusciter l’homme de Néandertal – un biotechnologue, George Church, a récemment soulevé cette hypothèse scandaleuse. Scandale ? Oui, sauf si l’opération prend sens dans un monde où la question “qui compose l’humanité ?” est devenue cruciale… »
La philosophe Isabelle Stengers se pose ici en lectrice passionnée de science-fiction, comme espace d’un autre monde radical, comme tentative de prise de nouvelles relations sociales.
Isabelle Stengers est philosophe. Collaboratrice régulière de la revue Multitudes, elle est aussi membre du comité d’orientation de la revue d’écologie politique Cosmopolitiques, et est à l’origine, avec Philippe Pignarre, de la création de la maison d’édition Les Empêcheurs de penser en rond. Après un premier livre remarqué, coécrit avec le prix Nobel de chimie Ilya Prigogine et consacré à la question du temps et de l’irréversibilité (La Nouvelle Alliance, 1979), elle s’intéresse ensuite à la critique de la prétention autoritaire de la science moderne, puis à critique de la psychanalyse. Elle se consacre depuis une quinzaine d’années à une réflexion autour de l’idée d’une écologie des pratiques, d’inspiration constructiviste. Elle a obtenu en 1993 le grand prix de philosophie de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre, et en 2010 le prix scientifique Ernest-John Solvay en sciences humaines et sociales.