Le chien et la branche

Devant notre université, il y avait un eucalyptus. Un jour, l’une de ses branches tomba avec un tel fracas que tous les étudiants, le personnel, les profs et un chien, vivant dans le campus, accoururent pour voir s’il n’y avait pas eu d’accident. Comme tout le monde, le chien regarda la branche, l’arbre, la foule des curieux, puis ànouveau la branche. Peut-être lui aussi pensait-il que la branche aurait pu tuer quelqu’un. Pourquoi la branche était-elle tombée ? La question ne le préoccupait sans doute pas. En tant qu’universitaire, il savait sà»rement que Newton était derrière la chute. Peut-être aussi que sa pensée était philosophique : la branche était fatiguée de vivre suspendue entre ciel et terre et s’était laissée choir ; ou bien avait-elle choisi de tomber au moment où il n’y avait personne en dessous d’elle, pour faire comprendre aux gens que, si elle le voulait, elle aurait pu écraser quelqu’un. Qui sait ? Elle avait choisi de tomber devant l’université pour que les intellectuels en parlent. Elle savait que les universitaires avaient la langue, comme lui, écumeuse et bien pendue. Cette dernière pensée canine ne pouvait être que politique.

2 novembre 2021
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