(5) Quel est l’apport du site Remue.net aux résidences d’écriture d’Ile-de-France ?

Je prends rendez-vous un lundi matin avec l’écrivain Patrick Chatelier. Nous buvons un café sur la place de la République.

« Le site remue.net a été créé par François Bon en 1997. Peu àpeu, il a ouvert ce site littéraire àdes amis. Au début des années 2000, ce collectif s’est fédéré autour d’un combat : protester contre la vente aux enchères des objets d’André Breton. Ils souhaitaient que l’Etat s’en portent acquéreur. Ensuite, François Bon s’est éloigné de remue.net pour créer la maison d’édition publie.net.  »

« Ce site fonctionne par invitations et cooptations. Le collectif se rencontre parfois physiquement, mais c’est finalement assez rare. La plupart des rencontres sont virtuelles.  »

« Il y a un comité de rédaction (composé d’une vingtaine de personnes) qui publie une revue trimestrielle. Chacun peut nous proposer des textes. En général, leur taille ne dépasse pas 15 000 signes. La science-fiction et le polar sont peu représentés, même si ce n’est pas un parti pris. On cherche des présences littéraires fortes et originales.  »

Patrick Chatelier a publié trois livres chez Verticales. Il travaille dans l’édition. Son premier roman est un polar dans lequel on ne trouve jamais la solution. « On ne comprend pas bien l’énigme, la trame.  »

« A chaque fois, j’écris des livres qui sont pareils et différents.
– Sont-ils conceptuels ?
– Je n’anticipe pas beaucoup. Je réfléchis après. Ce qui m’intéresse, c’est le cliché. Et la déformation du réel. Prendre des objets communs, et les transformer pour montrer leur double face. Leur profondeur.  »

« Dans mon premier roman, le jeune enquêteur est happé par tous les détails qu’il rencontre. Une jeune fille a reçu une balle. Il va dans sa chambre. Sa sensibilité est exacerbée. Il ne hiérarchise pas les différentes informations. Il fait une enquête comme sous hallucinogène.  »

« Un jour, j’ai été invité àla Maison Gueffier par Guénaë l Boutouillet pour présenter mon deuxième roman. Guénaë l faisait partie du collectif remue.net. En 2005, j’ai commencé àpublier sur ce site des textes autour du Général Instin, projet sur lequel je travaille depuis 1997. Je ne voulais pas que ce projet ait un centre et lui créer un site propre.  »

« En 2007, on m’a proposé d’entrer au comité de lecture de remue.net. En 2010, la Région ÃŽle-de-France a lancé un appel d’offres pour donner plus de visibilité aux résidences d’écrivains qu’elle finance. On a répondu àcet appel d’offres. C’est la première fois que de l’argent public entre dans notre association. Au départ, bien sà»r, on est tous bénévoles.  »

« Depuis qu’on bénéficie de ce partenariat avec la Région, on expérimente plusieurs formes. On met par exemple en place des vidéos de création. Ce qui nous intéresse, c’est la transversalité.  »

« 80% des écrivains en résidence jouent le jeu, ils publient (àun rythme plus ou moins important) des traces de leur résidence sur le site. On constate que les auteurs dramatiques y sont moins actifs. Peut-être parce qu’ils n’ont pas le même rapport àl’écrit.  »

« Notre site reçoit 40 000 visites mensuelles (la moitié sont des visites uniques). 20% de ces visites concernent les résidences d’écrivains. Il y a quelques années, il s’était passé un phénomène étrange (que tu avais peut-être remarqué sur ton blog) : tous les sites internet ont eu un pic inexpliqué de visites. Je pense que c’était dà» àdes robots. Ainsi, pour remue.net, on était passé à200 000 visites mensuelles. Maintenant les choses se sont stabilisées. Désormais, les gens arrivent sur notre site moins par hasard. L’usage du mobile change aussi les choses. Il faut qu’on s’adapte. Cela implique des investissements.  »

« Quelle est ton actualité littéraire ?
– Je viens de publier sur remue.net les débuts d’un nouveau projet autour d’un fait divers récent : le Voyage àBerck- sur-mer.  »

11 février 2014
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