Journal épisodique et fragmentaire (Jeudi 13 octobre)
Jeudi 13 octobre 201
Au retour d’une semaine de vacances sous le soleil et la pluie d’Héraklion, retrouvant le crachin et la douceur de l’automne normande, je me replonge sans plus tarder dans le voyage immobile qui m’entraîne aux frontières de l’Europe orientale. Vient d’abord la nécessité d’une relecture de ma pièce dans l’état où je l’ai laissée. Les premières intuitions et les premières ébauches de scène résistent correctement à cet exercice critique périlleux... Mon échappée crêtoise et le recul qui en découle ne les ont pas condamnées à une révision majeure. Même si rien n’est encore en place.
Mais je m’intéresse en priorité à la découverte des auteurs qui, d’une certaine manière, partageront ma résidence et à la façon dont je pourrais intervenir au cours de leur soirée. Au téléphone, avec Dominique, nous arrêtons définitivement un calendrier de manifestations publiques (rencontres, lectures et discussions) où ma présence en tant que médiateur est souhaitée. J’interviendrai ainsi au cours de neuf soirées pour la plupart regroupées entre la fin novembre et la première quinzaine de décembre. Au programme : Michal Walczac, Andréï Koureitchik, Le Colonel et ses oiseaux de Hristo Boytchev, Gilles Boulan, Veronika Boutinova, un cabaret Matei Visniec, Jeton Neziraj, Teki Dervishi, Kasem Tebreshina. Une formidable exploration et du pain sur la planche. Avec l’écriture de ma pièce (il faudra bien qu’elle soit présentable pour le 1er décembre) les lectures envisagées pour le comité francophone et plusieurs autres manifestations (exposition, lectures, palabres...) dont je ne serai que le témoin, aucun risque de chômer.
J’ai déjà lu, depuis cet été, les pièces de mes deux co-résidents : Jeton le Kosovar et Andreï leBielorusse (À quoi bon finasser ? Je finirai immanquablement par les appeler par leur prénom), Veronika Boutinova dont plusieurs textes me sont parvenus tant à la meo qu’au comité de lecture du Panta et La Forêt de Tebreshina. Je découvre l‘écriture incisive de Michal Walczak et son étrange vaudeville desespéré sur le ménage à trois (Pauvre de moi, la chienne et son nouveau type) avant de m’immerger dans le texte monumental de Teki Dervishi (Au seuil de la désolation), une Å“uvre impressionnante tant par ses dimensions (près de trois cent pages) ,sa profondeur, sa densité que par la sommité de travail qu’elle a exigée de son auteur (plus de dix ans d’écriture). Je pense à La tentation de Saint-Antoine de Flaubert que j’ai eu l’occasion de côtoyer à deux reprises, qui m’a accompagné à des moments très importants de ma vie professionnelle. Mais on peut aussi penser à Peer Gynt d’Ibsen ou au Chemin de Damas de Strindberg.
Tout à l’heure, je rappelle le Commandant Marey pour obtenir un rendez-vous au centre de rétention de Vincennes.