La sphère de Magdebourg, par Marcel Cohen
La question que soulève Cécile Wajsbrot est fondamentale pour les écrivains de ma génération et témoigner est généralement perçu comme une injonction morale. C’est cet impératif, ainsi que les impossibilités et les chemins nécessairement détournés, que je voudrais tenter de décrire.
Je suis né fin 1937, quatre ans après l’arrivée de Hitler au pouvoir, six mois après le bombardement de Guernica par la légion Condor, un an avant la Nuit de Cristal. Pour les hommes et les femmes de ma génération, les choses commençaient donc très mal. Effectivement, en 1943, j’ai perdu, le même jour, mon père, ma mère, ma jeune sœur, mes grands-parents paternels, un oncle et une grand-tante, tous déportés vers Auschwitz. L’année suivante, un oncle et une tante ont disparu à leur tour. J’avais cinq ans et demi. Je ne suis passé à travers les mailles du filet que par miracle pour devenir ce qu’on a appelé un « enfant caché ».
Je parlais d’une question « fondamentale ». En réalité, je me demande si cette épithète convient. Peut-être n’en existe-t-il pas de plus appropriée, mais ce mot fait figure de contresens si on entend par là « fondement », « base », « fondation », quelque chose, en tout cas, sur quoi l’écriture pourrait prendre appui, ou qui la motiverait de manière claire. Le terme peut paraître tout aussi paradoxal si on le considère dans sa seconde acception, c’est-à-dire comme quelque chose « d’essentiel ». Le point d’impact d’une bombe peut-il être considéré comme la base de quoi que ce soit ? Et, de même, le vide, le manque, l’absence qui en résultent doivent-ils être considérés comme « essentiels » lorsqu’il s’agit d’écrire ?
Je suis incapable de répondre à cette question. Il se peut que la littérature soit une manière de « sauver sa peau » pour reprendre l’expression de Jean-Paul Sartre dans Les Mots. Cependant, les livres, dont le but secret est de trouver une forme pour l’informe et des mots pour l’expérience confuse, n’en continuent pas moins à refléter la trace de l’écrasement. La littérature est peut-être un palliatif. Elle permet peut-être de conjurer le vide. Mais elle ne le comble pas et l’essentiel reste tout ce qui ne peut pas être dit.
L’impossibilité de dire, et la volonté de dire, se rejoignent donc comme deux forces qui s’opposent. Je pense à la fameuse sphère de Magdebourg dont on voyait la reproduction, sous forme d’une gravure ancienne, dans les livres de physique, lorsque j’étais au lycée. Deux chevaux tirent sur deux demi-sphères creuses accolées l’une à l’autre. On a fait le vide entre les demi-sphères. Les chevaux tirent en sens opposé sans parvenir à les séparer. Cependant, ce qui empêche les chevaux de réussir n’est que du vide.
Ce vide, il me semble l’avoir rencontré de manière très concrète lorsque j’ai commencé à vouloir écrire. J’avais publié un petit texte dans une revue littéraire à l’âge de vingt ans. Après quoi, pendant dix ans, je n’ai pas écrit une ligne. J’en étais tout à fait incapable, et pour différentes raisons. La plus importante était que je n’avais rien à dire.
De quoi aurais-je pu parler ? De mes premières amours ? J’ai été amoureux comme tout le monde, et j’ai souffert comme tout le monde. Mais je comprenais confusément qu’écrire un roman d’amour, par exemple (et pour ne citer qu’un cas d’école qui ne m’a jamais traversé l’esprit), revenait à considérer la Catastrophe comme une simple parenthèse. Les sujets qui me traversaient l’esprit se heurtaient tous au même constat : ils relevaient, sinon d’une couche d’expériences secondaires, du moins d’une strate qui ne m’engageait pas totalement. Quel que soit le sujet, je me sentais condamné à une sorte de demi-mensonge, ou de demi-vérité. Et je n’imaginais pas du tout que l’on puisse écrire pour dire que l’on n’avait rien à dire.
Mais pourquoi ne pas parler au moins de mon enfance ? Parce que mon enfance m’ennuyait profondément. Et comment parler du manque, de ce qui n’a pas eu lieu ? Les anciens enfants cachés, par ailleurs, ont tous eu la même histoire, à quelques menus détails près. J’ai lu certains de ces récits. Je n’avais rien à ajouter, ni à retrancher. En somme, mon enfance ne m’appartenait pas même en propre. C’est à cette conviction que je suis parvenu concernant ma biographie tout entière : après la Catastrophe, que je sois devenu écrivain, plombier, ou délinquant n’avait strictement aucune importance au regard de la réalité profonde de ma vie.
Il y avait d’autres raisons à mon impuissance face à l’écriture. En tant que Juif, mais en tant qu’homme tout aussi bien, je ne voulais, pour rien au monde, que quelque chose puisse attirer sur moi le moindre apitoiement, la moindre compassion. J’avais appris à me méfier de l’hypocrisie qui se cache souvent derrière de tels sentiments et je voulais rester libre d’accuser et de juger.
Quant à l’écriture elle-même, et quoi qu’on fasse, elle ne va pas sans une petite part de séduction, puisqu’il s’agit de convaincre. Or je ne voulais séduire personne, ni en parlant de moi, ni en parlant de ma famille, ni en évoquant indirectement la Catastrophe, ni par mon style, ni par le choix d’un sujet. Il me semblait que j’étais voué au silence.
D’ailleurs, sur la Catastrophe elle-même, qu’aurais-pu dire ? Tout ce que je sais, je l’ai appris dans les livres. Or, plus les anciens enfants cachés lisent, en quête de leur passé et d’une identité, et mieux ils comprennent qu’il n’y a pas de limites à ce qu’ils découvrent. Ce qu’ils apprennent équivaut à jeter la suspicion sur tout, et sur tous, y compris sur la littérature elle-même. Certains livres, que j’ai pu admirer, adolescent, et dans lesquels je croyais trouver une consistance, découvrir un écho à ma révolte, avaient tout d’une gangrène. Tel auteur qui me faisait vibrer alors que j’étais encore au lycée n’avait, en réalité, de cesse de m’envoyer à la chambre à gaz. Je n’en étais pas encore tout à fait conscient, mais je pressentais que le style, en littérature, pouvait n’être qu’un leurre. Qu’il pouvait, comme la musique, être tout à la fois séduisant et délétère. Il pouvait donc n’être qu’une forme raffinée de la perversité, du mensonge et du mal.
L’une de mes tantes a été déportée à Auschwitz. Elle a quitté Drancy avec l’un des derniers convois, en mai 1944, et ne doit sa survie qu’à cette déportation tardive. Quand je lui posais des questions, je m’apercevais que ses connaissances se limitaient à ce dont elle avait été le témoin direct à Birkenau. Elle n’avait aucune envie d’en savoir davantage.
Ce que je vais dire peut paraître monstrueux mais, entre vingt et trente ans, j’avais l’impression de savoir sur la Catastrophe beaucoup plus de choses que ma tante. Tandis qu’elle cherchait à exorciser son cauchemar, je passais beaucoup de temps à lire, non seulement sur les camps, mais aussi sur les modalités de la Catastrophe, sur ses étapes, sur l’Occupation et la Collaboration, sur les législations antijuives, sur l’attitude de l’Eglise, sur la vie dans les ghettos d’Europe de l’Est, sur la culture allemande, et pas seulement allemande, qui avait permis la Catastrophe, sur la passivité de l’Europe entière, sur l’attitude des Alliés qui n’avaient pas bombardé les voies de chemin de fer. Autant de sujets que ma tante n’avait aucune volonté d’approfondir. Peut-être, n’en avait-elle pas la force. En tout cas, malgré toute l’affection que nous éprouvions l’un pour l’autre, je n’ai rien appris de sa bouche et l’on en arrivait à cet autre paradoxe : celle qui pouvait témoigner, ne le voulait pas. Et celui dont le savoir ne cessait de s’accroître, ne le pouvait pas faute de légitimité.
Il y a un point sur lequel nous nous rejoignions, ma tante et moi : ce que nous savions nous retranchait aussi sûrement l’un que l’autre. Ma tante m’expliquait qu’à Béziers, où elle habitait, elle ne se sentait tout à fait bien qu’avec un petit groupe d’anciens déportés comme elle. « Nous n’avons pas besoin de parler pour nous comprendre », expliquait-elle. De mon côté, plus j’apprenais et plus le petit cercle de ceux avec qui je pouvais parler de la Catastrophe se rétrécissait. Mes interlocuteurs me paraissaient d’une ignorance telle, ils étaient si peu soucieux d’en savoir davantage que, soit je m’énervais et coupais court à la conversation, soit je me désespérais à l’idée de n’avoir aucune chance d’ébranler leurs convictions.
C’est dans cette impasse, que le terme de « fiction », évoqué par Cécile Wajsbrot prend toute son importance. Pourquoi un écrivain n’utiliserait-il pas ce qu’il a pu apprendre ? Le roman du XIXe siècle, qu’il appartienne à la tendance naturaliste ou à la tendance romantique, avait pour fonction de dévoiler les réalités. Le romancier du XIXe utilise tout ce qui est à sa portée : son expérience personnelle, ses convictions, sa subjectivité, mais aussi des faits-divers, et toute la documentation qu’il peut se procurer. Flaubert passe un temps considérable à se documenter sur le pied bot pour écrire Madame Bovary. Et, lorsqu’il écrit Salammbô, il se documente auprès des minéralogistes pour savoir quelle est la nature des rochers, et donc la couleur ambiante, dans les faubourgs de Carthage, à la tombée du jour. Pourquoi, s’agissant de la Catastrophe, le recours à la fiction paraît-il d’emblée si suspect ?
Deux jugements me viennent à l’esprit que je voudrais placer en exergue. Le premier est de Maurice Blanchot. S’agissant de la Catastrophe, il écrit : « Il y a un degré de la douleur humaine au-delà duquel l’exercice d’un art devient une insulte à cette douleur [1] ». Le second est de Susan Sontag. Dans son dernier livre, elle évoque les photos des « Gueules cassées » de la Première Guerre mondiale que l’on n’hésite plus à montrer aujourd’hui dans les musées, et que l’on vient regarder comme s’il s’agissait d’œuvres d’art. L’analyse de Susan Sontag prolonge le jugement de Blanchot. Pour Sontag, une catégorie de regardeurs, et une seule, est moralement fondée à scruter ces photos sans tomber dans le voyeurisme le plus douteux : les spécialistes de la chirurgie réparatrice qui peuvent en tirer des enseignements pour opérer aujourd’hui les accidentés de la route [2].
Je ne connaissais évidemment pas ces jugements à l’époque où je tentais d’écrire, mais il me semble que je les devinais. En tout cas, il m’apparaissait clairement que nul n’avait le droit de se substituer aux témoins. Ni aux historiens qui tentent d’éclairer ce qui se situe au-delà du témoignage, et quelle que soit la modestie de celui-ci. Cette décence élémentaire avait beau aller de soi, elle n’était pas l’essentiel.
Ce dont mes lectures m’avaient convaincu, et ce n’était pas difficile, c’est que la Catastrophe n’avait rien de commun avec les horreurs dont l’Histoire est coutumière. Ce qui était incommensurable, ce n’était pas seulement l’ampleur du crime (le Goulag s’est révélé infiniment plus meurtrier), c’était sa nature au cœur même de la vieille Europe. La Catastrophe, pour la première fois, réduisait à néant, et sans exception, toutes les valeurs dont notre culture était si fière, souvent depuis deux mille ans, et en tout cas depuis les Lumières. Ce n’est pas tout : pour la première fois, l’ordre de massacrer venait de la plus haute instance de l’Etat et mobilisait tous ses rouages bureaucratiques sans exception, dans l’Europe entière.
Avait-on vu des policiers livrer des innocents aux assassins, des magistrats fermer les yeux sur les crimes, des médecins torturer au lieu de soigner, des religieux qui ne voulaient pas entendre les suppliciés, des fonctionnaires qui spoliaient et pillaient en toute légalité, des juristes qui rédigeaient des lois iniques et à effet rétroactif, des milliers de particuliers qui dénonçaient des innocents, des criminels de droit commun qui, dans les camps, avaient autorité sur les innocents, des industriels qui construisaient des usines destinées à donner la mort ? La firme Topf de Wiesbaden, qui fabriqua et installa les fours crématoires, resta en activité jusqu’en 1975 sans même changer de raison sociale [3]. L’idée d’une quelconque responsabilité n’effleura même pas ses dirigeants. « Les Juifs pensaient mourir en même temps que la justice », résumait Emmanuel Lévinas. Il ajoutait : « l’amitié elle-même n’était plus sûre [4] ».
Avertis par deux mille ans de ghetto, de discriminations et de pogroms, les Juifs eux-mêmes n’avaient rien vu venir. Comme le remarque Yosef Hayim Yerushalmi, les tsars, les rois, les princes, les papes, avaient pu fermer les yeux sur les pogroms. Ils avaient pu être à l’origine des discriminations, y compris en confinant les Juifs dans des ghettos, jamais, en deux mille ans, ils n’avaient eux-mêmes ordonné les massacres. Au contraire, c’est toujours l’autorité suprême qui, en dernier ressort, y avait mis un terme. Lorsque les ordres venaient d’en haut, le pire auquel les Juifs avaient appris à faire face en deux mille ans, c’était la conversion forcée et l’expulsion [5].
Voilà pourquoi chaque ancien déporté, aussi modeste que puisse paraître son témoignage, représente bien une chance d’approcher l’immense trou noir où s’est abîmée toute une civilisation. Aucun détail n’est indifférent et chaque voix est une occasion unique de regarder d’un peu plus près, comme on explore une ruine avec une lampe de poche. L’envoyé spécial du journal Le Monde à Jérusalem en 1961, lors du procès Eichmann, résumait : « Chaque témoignage repousse les limites de l’imaginable [6] ». J’ai bien connu ce journaliste. Catholique, résistant, et ancien déporté dans un camp de travail, il connaissait mieux que quiconque la différence abyssale entre son expérience et celle des Juifs dans les camps d’extermination. Sa remarque est donc à prendre à la lettre.
Lorsqu’il s’agit « d’écrire la Catastrophe », pour reprendre la formulation de Cécile Wajsbrot, il faut donc se demander ce que la fiction peut apporter qu’on ne trouve ni dans les témoignages ni dans le travail des historiens, ni dans la réflexion des philosophes. Lorsque Flaubert est traîné en justice, après la publication de Madame Bovary, c’est parce qu’il dévoile ce que la morale bourgeoise réprouve. Seule la littérature pouvait dénuder ces réalités parce qu’elle en avait seule la volonté, le courage et les moyens, à une époque où les sciences humaines n’existent pas.
S’agissant de la Catastrophe, c’est tout le contraire. Nous connaissons aujourd’hui toutes ses modalités. Nous savons les dates de départ et l’heure d’arrivée de chaque convoi, le nom et le nombre des déportés dans chaque train. Sur les faits proprement dits, nous n’avons plus rien à apprendre. Toute fiction est donc en retrait par rapport à la réalité. Loin de révéler quoi que ce soit, elle ne peut que ramener l’inconnu à du connu. Cela revient à nier la spécificité même de la Catastrophe.
Léonard de Vinci expliquait déjà que l’imagination est incapable de concevoir quoi que ce soit sans se référer à des éléments connus [7]. Pour créer les Gorgones, qu’aucun homme ne pouvait dévisager sans être pétrifié sur-le-champ, il fallait un visage de femme, des défenses de sanglier, des ailes d’oiseau et une chevelure composée de serpents. Il faut donc se demander si, contrairement au roman du XIXe siècle, la fiction, s’agissant de la Catastrophe, n’a pas aujourd’hui pour conséquence, et pour fonction inconsciente, de masquer les réalités au lieu de les révéler. Ou, du moins, de les rendre plus tolérables.
Bruno Bettelheim faisait remarquer que le mot « Holocauste », utilisé dès la fin de la guerre, est déjà une manière inconsciente de détourner le regard [8]. Outre que l’holocauste biblique était un acte volontaire, qu’il s’agissait d’un animal, et qu’il n’est plus pratiqué depuis deux mille ans, il n’était nullement question de Dieu dans les camps. Au contraire : pour Hans Jonas l’idée même que l’Homme ait pu être créé à l’image de Dieu n’est plus acceptable [9]. Pour d’innombrables anciens déportés, Auschwitz est l’ultime preuve de l’inexistence de Dieu et Cholem-Aleikhem écrivait : « Si Dieu habitait sur terre, on jetterait des cailloux dans ses fenêtres [10]. » Cette référence à la Bible accrédite donc une idée : si la Catastrophe a quelque chose à voir avec Dieu et avec la Bible, alors notre civilisation chrétienne ne pouvait ni l’empêcher ni, à plus forte raison, en comprendre les motivations profondes. La responsabilité de chacun s’en trouve amoindrie.
Je ne voudrais pas faire de la psychanalyse de café du commerce. Je rappelle seulement ce qu’André Glucksman dit de l’Histoire en général : elle n’est jamais qu’un moyen d’organiser le passé d’une manière qui ne pèse pas trop sur les épaules [11]. En tout cas, ce sont les faits qui sont insupportables lorsqu’on aborde la Catastrophe, pas du tout les fictions que l’on peut en tirer.
Un seul exemple : dans les salles de cinéma où, après la guerre, les Allemands, s’ils voulaient obtenir leurs cartes de rationnement, étaient tenus de voir les images tournées à Dachau et à Buchenwald par les cinéastes américains, un témoin note que la plupart des spectateurs tournaient ostensiblement la tête dès le début du film et restaient ainsi jusqu’à la fin [12]. Mais il ne fait aucun doute que le public allemand aurait regardé avec intérêt une fiction montrant les nazis comme des malades mentaux, ou bien le dilemme d’un officier de la Wehrmacht déchiré entre sa désapprobation et le respect des ordres reçus. Dans la salle, tout le monde se serait senti soulagé.
En réalité, il y a longtemps qu’on ne se contente plus de tourner la tête devant les réalités, comme dans l’Allemagne de 1945. Il faut aujourd’hui avoir en mémoire le mot terrible du prix Nobel de littérature Imre Kertesz sur « ceux qui volent l’Holocauste à ses dépositaires pour en fabriquer des articles de pacotille [13] ».
Des dizaines d’articles, et de nombreux livres, ont été écrits pour dénoncer la tentation, de plus en plus courante, de substituer des fictions à la parole des déportés eux-mêmes. Il existe même une expression pour dénoncer cette dérive et la curiosité malsaine que dénonçait Susan Sontag : la « pornographie de la Shoah ». Et, en effet, il est rare que ces fictions ne désinforment pas. Dès 1990, l’historien Raul Hilberg dénonçait : « La manipulation de l’Histoire opérant une sorte de sabotage et le style pompier équivalant à une dégradation [14] ».
Un seul exemple : les bourreaux étaient-ils bien les brutes insensibles et les malades mentaux que la fiction met en scène avec complaisance ? Otto Olhendorf qui, avec l’Einzatgruppen qu’il commandait, participa personnellement à l’exécution de quatre-vingt-dix-neuf mille personnes en Ukraine en 1941, était docteur en droit et spécialiste de la jurisprudence. Il avait étudié dans les universités de Leipzig, Göttingen et Pavie. En 1938, il était considéré comme l’un des juristes les plus prometteurs de sa génération et occupait de hautes fonctions dans l’organisme chapeautant l’ensemble du commerce allemand [15].
Une étude récemment menée par un jeune historien prouve d’ailleurs qu’on trouvait chez les SS plus de diplômés de l’enseignement supérieur que dans la moyenne nationale allemande. En réalité, nous savons bien que ces hommes n’avaient aucune conscience de commettre des crimes. Pour Günther Anders, le meurtre était devenu un « simple travail [16] ».
Voilà bien ce qui fait le plus mal : un diplômé de l’enseignement supérieur fait un bien meilleur travailleur du crime qu’un simple garçon boucher. Autre réalité insupportable : il n’est rien arrivé du tout aux rares officiers de la Wehrmacht qui ont refusé d’exécuter certains ordres infâmes et demandé leur mutation. Au pire, ils ont été mutés d’office.
Quant à l’esthétique, qui prévaut le plus souvent, s’agissant de la Catastrophe, et au cinéma comme en littérature, elle s’apparente plus à la dépravation morale qu’à la réflexion sur le travail de l’artiste ou sur une nécessaire éthique de la représentation. Car, s’il est un sujet où éthique et esthétique sont indissociables, c’est bien celui-ci.
Personne n’a mieux dénoncé ces dérives que le metteur en scène Jacques Rivette. Dans un article célèbre des Cahiers du cinéma, il s’en prenait à un metteur en scène montrant le suicide d’un déporté qui se jette sur les barbelés électrifiés. Jacques Rivette écrivait : « L’homme qui décide, à ce moment, de faire un travelling avant pour recadrer le cadavre en contre-plongée en prenant soin d’inscrire exactement la main levée dans un angle de son cadrage final, cet homme n’a droit qu’au plus profond mépris [17]. »
Ce qui est insupportable au cinéma est-il plus acceptable dans un texte ? Le texte, en réalité, nous entraîne plus loin que l’image. Au cinéma, aussi exacte que puisse être la reconstitution, nous n’oublions pas que les morts ne sont pas morts, que les SS sont des figurants, et que les déportés rentrent chez eux tous les soirs.
Le roman traditionnel, au contraire, ne prétend nullement être une simple représentation, au même titre qu’un film ou un tableau. Marthe Robert fait remarquer que le romancier n’a le choix qu’entre deux stratégies : soit il écrit une fable, soit il cherche à faire croire par tous les moyens que son texte donne de la réalité un rapport complet et véridique [18].
Il y a autre chose : les mots lus sont plus difficiles à chasser de notre esprit puisque c’est nous, lecteurs, qui formons les images à partir des petits signes abstraits de l’alphabet. Or, comment chasser une image mentale dont nous sommes le seul metteur en scène ?
De même, le romancier, comme le cinéaste, ne retient que ce qui lui semble le plus significatif. Peut-on décrire des hommes et des femmes vivant une suite de jours gris, parfaitement indifférenciés, astreints à un travail éreintant et monotone, et qui ont perdu tout espoir, sans être parvenus pour autant au fond du désespoir ? Ils sont trop brisés pour nourrir encore la moindre nostalgie du passé, la moindre idée de rébellion. Mieux : ils ont compris que le plus grand danger c’est, précisément, d’avoir la faiblesse d’évoquer le passé. S’il leur reste un tout petit peu d’avenir, il passe par l’amnésie. Évoquer le passé reviendrait à consumer en vain ses dernières forces. Le comble du malheur est donc d’être parvenu à un stade où le mot « malheur » lui-même a perdu son sens.
Il faudrait un très gros livre pour rendre compte d’un tel état. En réalité, ce livre serait illisible pour une raison simple : il ne s’y passerait rien. Chaque scène reproduirait à l’identique la scène précédente, et ainsi de suite. C’est pourquoi, il n’y a aucune fiction sans le hurlement des kapos, les coups, les cris, les bousculades. Bien entendu, tout cela a existé mais, et tout aussi sûrement, si ces cris et cette violence sont si souvent présents dans la fiction, c’est parce qu’ils sont seuls à pouvoir être représentés.
Nous touchons le point où l’impossibilité de donner à voir recoupe la volonté de ne pas regarder. C’est pourquoi les grands témoins, dont nous avons tous les noms en mémoire, sont aussi de grands écrivains. Ils ont su, et seuls, faire parler des détails infimes et trouver des mots pour ce qui, sans eux, serait resté soit de l’ordre du cliché, soit de l’ordre de l’indicible.
L’historien Michel Borwicz [19] cite à ce propos le cas d’un journaliste professionnel, reporter dans un grand quotidien de Varsovie. Lorsqu’il fut déporté à Treblinka, nul n’était plus qualifié que lui pour rendre compte de ce qu’il voyait. Il réussit même à faire sortir son texte du camp. Or ce texte est tombé dans le plus total oubli. Comment est-ce possible ? Persuadé qu’il assistait à des scènes jamais vues, et qui dépassaient l’imagination, le journaliste multiplie les adjectifs, les superlatifs, les figures de rhétorique et les références à l’Enfer de Dante. Il en oublie que, chez Dante, ce sont les coupables qui sont au supplice, non les innocents. Mais quelle autre référence aurait-il pu avoir en mémoire ?
Le journaliste avait beau être animé des meilleures intentions, il était victime du sensationnalisme sans lequel les événements ont peu de chances de retenir l’attention. Ce n’est faire insulte ni à sa souffrance, ni à son courage, que de reconnaître que ce journaliste n’avait pas l’étoffe d’un écrivain. Pour Borwicz, en lisant son témoignage on finit même par perdre de vue ce que Treblinka avait de spécifique, à savoir que c’était une usine à haut rendement. Et le propre d’une usine est de fonctionner sans heurt, sans cri, sans bousculade, sans perte de temps, et en écartant, en l’occurrence, tout sentiment, chez les bourreaux comme chez les victimes. La violence, c’est même ce qu’il convenait de bannir parce qu’elle aurait contribué à gripper la machine. Dans une usine, par ailleurs, il n’y a rien de sensationnel. Ce qui évoque le mieux Auschwitz et Treblinka, c’est donc bien le détail plat, presque invisible. Ce sont, par exemple, les sept tonnes de cheveux féminins, soigneusement pesés et empaquetés avant d’être transformés en feutre.
Il n’y a pas lieu de s’étendre sur ce chapitre. Je voudrais pourtant citer un détail qui va exactement à l’encontre du sensationnalisme habituel. Il montre l’ultime petite part d’humanité dont des êtres humains restent capables dans les situations extrêmes. C’est autant à cette petite humanité qu’aux hasards des circonstances que certains déportés sélectionnés pour le travail doivent d’avoir survécu.
Dans une récente émission de la chaîne Arte, une survivante expliquait que l’hiver, les appels du matin pouvaient signifier une heure, voire deux heures et plus d’immobilité dans le froid. Les femmes du dernier rang glissaient donc leurs mains sous les aisselles des détenues de l’avant-dernier rang pour en tirer un tout petit peu de chaleur. Les détenues de l’avant-dernier rang en faisaient autant. Dès que le kapo se mettait à marcher pour se réchauffer, les détenues se relayaient dans les rangs les plus exposés au vent pour que chacune ait des chances à peu près égales de se réchauffer un peu. Cependant, ce détail capital n’a pas retenu l’attention de l’interviewer, ni du réalisateur de l’émission. On passa très vite à un autre sujet.
Je disais qu’entre vingt et trente ans, je voulais désespérément écrire sans y parvenir. Cependant, je continuais à croire passionnément au pouvoir de l’écrit. Il me semblait même que rien n’existe tant que nous ne sommes pas capables, et d’une façon ou d’une autre, de donner une forme à notre expérience. En d’autres termes, je voyais dans la littérature la seule naissance possible puisque, me semblait-il, nous ne sommes tout à fait vrais que dans les livres. Leonardo Sciascia n’estimait-il pas que « la plupart des hommes ne savent rien d’eux-mêmes et du monde si la littérature ne le leur apprend pas [20]. » ?
Il y avait une dernière raison à mon impossibilité d’écrire : la forme romanesque traditionnelle, ce que Cécile Wajsbrot appelle le « roman-roman », ne me convenait pas. Je ne voyais pas l’utilité d’inventer des personnages, de les décrire, d’inventorier leurs goûts, leurs traits de caractère, etc. Face aux sciences humaines, et notamment à la psychanalyse, il me semblait que l’essentiel de la matière vive du roman s’était volatilisée.
Bien entendu, le roman est un genre à réinventer sans cesse, et par chaque écrivain. Bien des expériences ont été faites en ce sens que nous avons tous en mémoire, mais le choc de la Seconde Guerre mondiale les a rendues impératives, et au point que Thomas Mann, en exil aux Etats-Unis pendant la guerre, estimait déjà que seuls mériteraient encore le nom de « roman » les livres qui, précisément, ne se présentaient plus comme tels.
La bonne question consisterait donc à se demander aujourd’hui pourquoi nous restons si désespérément attachés à cette forme littéraire, dans ce qu’elle a de plus classique et de plus impropre à contenir les réalités d’aujourd’hui. Serait-ce pour nous rassurer en nous raccrochant à l’idée que le monde est resté le même, qu’il est aussi intelligible, que nous restons, comme par le passé, maîtres de notre destin individuel ?
Le roman, en effet, est une mécanique sophistiquée et intelligente. Il suppose une logique, quand toute logique s’est effondrée. Les personnages de roman agissent en fonction de leur psychologie, de leur passé, de leurs passions, de leur caractère. Or, pour les Juifs, pendant la guerre, ces motivations intérieures avaient perdu toute emprise sur leur destin. Le jeune et le vieux, le riche et le pauvre, l’intellectuel et l’ouvrier, le laïc et le religieux, ont si bien vu leurs destins se confondre qu’ils ne comprenaient pas eux-mêmes comment une telle réduction était devenue possible.
Ce n’est pas seulement là une expérience juive et le fait que les motivations intérieures aient de moins en moins de poids sur notre destin individuel était déjà aveuglant pendant la Première Guerre mondiale. Pour la première fois, on était allé jusqu’à envoyer des régiments à l’assaut sans munitions face à l’artillerie lourde : l’état-major savait que seul le nombre permettrait de submerger l’ennemi. L’important n’était donc plus de se battre, il s’agissait d’accepter de se faire sagement tuer.
Aujourd’hui, la crise économique nous rappelle que ceux qui ne trouvent pas de travail, ou qui le perdent, ne sont ni moins compétents ni moins courageux que quiconque : simplement, nul n’a plus besoin d’eux. Emmanuel Lévinas : « Tout se passe comme si le Moi, identité par excellence, à laquelle remonterait toute identité identifiable, faisait défaut à lui-même, n’arrivait plus à coïncider avec lui-même [21]. »
C’est pourquoi l’architecture même du roman traditionnel, avec son début, son apogée, sa fin, l’enchaînement logique et subtil des chapitres, est, elle aussi, une manière de s’écarter des réalités. Comment faire entrer l’expérience d’un homme de plus en plus « privé de lui-même », et sans prise directe sur son destin, dans une forme littéraire qui donne l’illusion du contraire ?
Gaëtan Picon résumait ainsi le parfait dénuement de l’écrivain contemporain. Aujourd’hui, note-t-il, les écrivains « partent d’un vide initial, de ce moment où toute parole fait défaut. Tout au long de leur œuvre, on peut même dire qu’ils ne font rien d’autre qu’apprendre à parler. L’expression est-elle possible ? Le langage est-il possible ? Telle est la question préalable qui se pose pour tous, avec une force obsédante et une rigueur sans précédent [22]. »
On a bien des raisons de vouloir « réapprendre à parler » et de penser que la littérature classique que nous avons appris à aimer, et que nous aimons encore, n’est plus qu’un témoignage du passé. Plus nous lisons les grands romans du XIXe siècle, plus nous les aimons, et plus nous sentons notre solitude et notre différence. Certes, nous nous reconnaissons dans ce que nous lisons, mais comme nous nous reconnaissons sur une photo d’enfance, c’est-à-dire sans retour en arrière possible et avec toute la nostalgie du souvenir.
On se souvient qu’Adorno en déduisait que la poésie n’était plus possible après Auschwitz. Il est vrai qu’il est revenu sur ce jugement à propos de la poésie de Paul Celan. C’est ce qu’on oublie généralement de préciser. Ecrire, si cela reste possible, c’est donc écrire après la Catastrophe et chacun fait ce qu’il peut. Le temps est passé, lui aussi, où l’on pouvait se rassurer avec des théories littéraires, ou en faisant partie d’une petite chapelle.
L’écrivain est donc plus seul et plus démuni que jamais. Personnellement, je n’ai toujours pas résolu le problème de savoir ce que je pourrais bien mettre dans mes livres. Il me semble que tout pourrait y entrer si j’en avais la capacité. En tout cas, et c’est peut-être une infirmité, je ne parviens pas à décider quel sujet serait plus important que tel autre. Il me semble que, dès lors que je suis quelque part, rien, en toute logique, n’est plus important que ce que je vois à ce moment-là. Je pense ici au mot attribué à Hillel dans le Talmud : « Si je suis ici, tout est ici, et si je ne suis pas ici, qui est ici ? »
Il n’y a pas d’autres raisons à l’aspect décousu de mes livres. Si l’on y passe sans transition d’un sujet à l’autre, et du plus grave au plus futile, je me dis, mais ce n’est qu’une explication après coup, que c’est ainsi que cela se passe dans la vie et c’est aussi comme ça dans les musées. On montre, dans la même vitrine, et sans hiérarchie de valeur, une petite statuette grecque de Tanagra et une fibule en fer dont le rôle était purement utilitaire, un précieux bijou en or et un mors de cheval, une sandale et un fragment de poterie. Ce qui liait ces objets, ce qui pouvait rendre ce voisinage cohérent, a disparu.
Tout cela, une fois encore, n’a rien d’une théorie. On n’écrit pas à partir d’une théorie, on ne fait que l’illustrer. Et, de même, l’écrivain ne choisit ni son style ni sa manière. Il ne parvient à l’un et à l’autre qu’à force de rejets successifs. Ce que l’écrivain donne à lire n’est donc pas ce qu’il aurait aimé écrire : c’est seulement ce qui lui semble le moins mauvais et le moins mensonger.
Robert Bresson faisait remarquer que les images les plus éloignées les unes des autres, et les plus disparates, ont nécessairement un lien : le regard de celui qui les contemple [23]. John Berger fait une remarque identique : lorsqu’un artiste, ou un photographe, s’attache à représenter un arbre, ce n’est pas simplement un arbre que nous voyons, c’est un arbre vu par un artiste ou un photographe [24].
Le regard que nous portons sur le monde après la Catastrophe, peut-il tenir lieu de témoignage pour un homme de ma génération ? Une forme d’absence de l’auteur à lui-même peut-elle tenir lieu de présence pour le lecteur ? Ce sont d’autres questions auxquelles je n’ai pas de réponse. Mais je me souviens qu’envoyé spécial d’un quotidien parisien en Israël lors de la guerre des Six Jours, j’avais été frappé par cette évidence : contrairement à une église ou à une mosquée, le Mur des lamentations n’est pas un lieu où l’on peut se réfugier et se sentir à l’abri. Lorsqu’on l’a contemplé, il faut nécessairement se résoudre à lui tourner le dos pour regarder le monde.
J’en suis venu à me dire, et de manière parfaitement empirique une fois encore, que le travail de l’écrivain peut aussi consister à écrire le moins possible, voire à ne pas écrire du tout. En d’autres termes, j’en suis venu à me dire que je pouvais me contenter de montrer du doigt et de mettre en forme des « faits » observés autour de moi, ou qui retenaient mon attention dans mes lectures, dans les journaux ou à la télévision.
Des sortes de citations, en somme, ou de photographies instantanées, qui ne prétendraient nullement recréer un tout cohérent. Ces textes seraient accompagnés de notes, comme dans les ouvrages savants, pour signaler mes emprunts et bien prouver qu’il ne s’agit, en aucune façon, de fictions. Pour des livres de ce type, qui me ressemblent, alors même que je donne l’impression d’être si peu présent, le titre n’avait pas besoin d’être cherché très loin. Ils s’appelleraient tout naturellement « Faits ».
Dans ces livres, tout pourrait donc entrer, dans n’importe quel ordre, et il appartiendrait au lecteur, et à lui seul, de trouver un sens. Et, de même, le lecteur pourrait, tout aussi bien, juger l’entreprise parfaitement absurde.
Voilà, à peu de choses près, où j’en suis aujourd’hui.
[1] Maurice Blanchot, L’Écriture du désastre, Gallimard, Paris, 1980.
[2] Susan Sontag, Devant la douleur des autres, traduit de l’anglais par F. Durant-Bogaert, Christian Bourgois, Paris, 2003.
[3] Primo Levi, Les naufragés et les rescapés, traduit de l’italien par André Maugé, collection « Arcades », Gallimard, Paris, 1989.
[4] Emmanuel Lévinas, Noms propres, Fata Morgana, Montpellier, 1976.
[5] Yosef Hayim Yerushalmi, Serviteurs des rois et non serviteurs des serviteurs, Éditions Allia, Paris, 2011.
[6] Jean-Marc Théolleyre, cité par Samuel Blumenfeld dans son article « Badinter, témoin », Le Monde Magazine, 9 avril 2011.
[7] Léonard de Vinci, Les Carnets, traduction de l’anglais et de l’italien par Louise Servicen, Gallimard, Paris, 1954.
[8] Bruno Bettelheim, Survivre, traduit de l’américain par Théo Carlier, Éditions Robert Laffont, Paris, 1979.
[9] Hans Jonas, Le concept de Dieu après Auschwitz, traduit de l’allemand par Philippe Ivernel, Rivages poche, Paris, 1994.
[10] Cholem-Aleikhem, cité par Alain Salles, journal Le Monde, 16 décembre 1999.
[11] André Glucksman, cité par André Leysen, journal Le Monde, 2 juillet 1995.
[12] Tony Judt, cité par Pierre-Emmanuel Dauzat, Holocauste ordinaire, Bayard, Paris, 2007.
[13] Imre Kertész, cité par Pierre-Emmanuel Dauzat, op. cit.
[14] Raul Hilberg, cité par Pierre-Emmanuel Dauzat, op. cit.
[15] Raul Hilberg, La Destruction des Juifs d’Europe, Fayard, Paris, 1985. Voir aussi le documentaire de Christian Delage, Le Procès de Nuremberg, France, 2006, diffusé par la chaîne Arte, 5 août 2009.
[16] Günther Anders, Nous, fils d’Eichmann, traduit de l’allemand et présenté par Sabine Cornille et Philippe Ivernel, Rivages poche, Paris, 2003.
[17] Jacques Rivette, Les Cahiers du cinéma, n° 120, juin 1961.
[18] Marthe Robert, Roman des origines et origines du roman, Tel Gallimard, Paris, 1972.
[19] Michel Borwicz, Ecrits des condamnés à mort sous l’occupation nazie, Idées/Gallimard, Paris, 1973.
[20] Leonardo Sciascia, cité par Claudio Magris, Utopie et désenchantement, collection « L’Arpenteur », Gallimard, Paris, 2008.
[21] Emmanuel Lévinas, « Sans identité », revue L’Ephémère n° 13, printemps 1970.
[22] Gaëtan Picon, « Situation de la jeune poésie », dans L’usage de la lecture, tome II, Mercure de France, Paris,1960.
[23] Robert Bresson, Notes sur le cinématographe, Gallimard, Paris, 1995.
[24] John Berger, L’Air des choses, traduit de l’anglais par Fanchita Gonzalez Battle, François Maspéro, Paris, 1979.