Les rendez-vous de la résidence de Jean-Paul Curnier

Voir aussi sur le site de Khiasma.

Khiasma, 15, rue Chassagnolle 93260 Les Lilas. M° Porte des Lilas, Mairie des Lilas.

Mardi 28 janvier à 20h30
Lancement de résidence


Philosopher à l’arc, c’est le titre d’un livre récent publié par J-P Curnier ; ce titre désigne ce qui fait le contenu de ce livre : une autre condition, une autre expérience de la pensée. Donc aussi une autre forme de pensée. C’est en quelque sorte une forme d’« expérience extérieure » qui fait réponse à la notion d’« expérience intérieure », développée par Georges Bataille).


Elle se déploie dans l’exercice de la chasse à l’arc. Aussi, très vite, la pensée dont il est question est celle à la fois du fait de devoir tuer pour manger et celle de savoir qui tue qui étant donné l’expérience particulière de la chasse à l’arc. Pourtant cette expérience est celle de l’homme qui nous a précédé.
— Elle implique une confusion, une sorte d’osmose entre la proie et le chasseur dont la trace dans les civilisations contemporaines n’a pas totalement disparu.
— Inversement, cette expérience implique un rapport de fraternité avec la matière du monde (avec la « chair » des êtres du monde) qui ne permet pas de penser le rapport aux animaux ni à la prédation en général de la même façon que celle que nous connaissons et qui élargit notre sensation d’appartenance au vivant et à l’humain d’une manière considérable. Non seulement les notions de bien et de mal n’y sont plus les mêmes, mais l’éthique qui règle les rapports entre les êtres ne se fonde pas sur les mêmes certitudes.
Venant comme en prolongement de cette osmose dans le rapport de vie et de mort pour la nutrition, la chasse à l’arc, du fait de la courte portée des flèches, implique un rapprochement maximal avec les proies. Cela signifie d’une part une connaissance approfondie et presque intime des animaux, mais aussi une faculté commune à une très grande partie des êtres vivants qui prend tout son sens ici pour le chasseur : celle du camouflage, du brouillage des apparences, de la discrétion absolue de soi. Jusqu’à ne plus exister que comme un animal, précisément.
Se camoufler, ce n’est pas se cacher, c’est jouer avec les perceptions de l’autre, c’est troubler ses habitudes, introduire de l’incongru dans sa connaissance, souvent très étendue, de l’homme comme prédateur. Alors, l’expérience de l’arc devient une expérience décisive qui ne permet plus de retour en arrière et ne peut plus se contenter de faux-fuyants.


Ici commence une forme de réflexion sur les questions qui agitent notre époque et qui, c’est le sens de cette soirée de présentation et de discussion, ouvre sur trois questions essentielles :
— celle de la morale que l’homme voudrait s’imposer vis-à-vis de la Terre et vis-à-vis de l’environnement,
— celle de la propriété comme règle générale de l’existence des hommes sur Terre et des droits et devoirs qu’elle implique,
— celle du pouvoir comme forme de mise en suspens de la guerre de tous conte tous, mais avant tout comme émanation de la guerre et évocation constante de la guerre.


Mardi 25 février à 20h30
Le voyage, la terre, la propriété du sol
Conversation avec Sébastien Thiéry


Dans le cadre de sa résidence d’écrivain à Khiasma, Jean-Paul Curnier propose durant toute l’année 2014 une série d’évènements publics (conversations, performances, concerts) autour de sa recherche sur les relations entre prédation et démocratie. Chaque rencontre explore avec son invité l’un des motifs de son travail d’écriture en cours allant de l’appropriation de la terre à la piraterie en passant par une réflexion sur la place singulière de l’espèce humaine dans son écosystème.



Pour cette première conversation publique, Jean-Paul Curnier accueille Sébastien Thiéry, coordinateur du collectif Le Perou.

Où il sera question des marges de la cité, de ceux que l’on appelle les Roms, du droit à la ville pour les improductifs et du droit au sol pour tous.

Cette rencontre sera précédée de la projection du film court « Considérant qu’il est plausible que de tels événements puissent à nouveau survenir » de Sébastien Thiéry.


Association loi 1901 fondée en septembre 2012, le PEROU est un laboratoire de recherche-action sur la ville hostile conçue pour faire s’articuler action sociale et action architecturale en réponse au péril alentour, et renouveler ainsi savoirs et savoir-faire sur la question. S’en référant aux droits fondamentaux européens de la personne et au « droit à la ville » qui en découle, le PEROU se veut un outil au service de la multitude d’indésirables, communément comptabilisés comme cas sociaux voire ethniques, mais jamais considérés comme habitants à part entière.


Mardi 18 mars 2014 à 20h30
Le Sang, la Fortune, la Gloire, les Amours 

Conversation avec Jacques Durand 



L’hôte peut désigner la personne qui est reçue ou celle qui reçoit, un double sens que Jean-Paul Curnier a décidé de mettre à profit dans le cadre de sa résidence à l’espace Khiasma. Pour cette soirée, il a donc invité Jacques Durand, écrivain taurin de renommé, à venir s’entretenir avec lui sur l’éthique et l’esthétique de la tauromachie, dont ce dernier exprima toutes les facettes dans les chroniques qu’il livra jusqu’en 2012 au journal Libération. Aussi, ce qui pourrait ressembler à première vue à une cambiada – passe destinée à détourner la charge du taureau – dans la réflexion de Jean-Paul Curnier se révèle comme le développement d’une intuition première. Sous les traits du torero défiant la mort avec panache, et sacrifiant parfois sa vie à son goût pour le risque et les actions d’éclat, Jean-Paul Curnier discerne en effet la figure voisine du pirate dont l’existence brève, joyeuse et violente, toute en dépenses et en excès, fut le creuset de formes d’organisations politiques basées sur l’autogestion, l’égalité, et le souci du bien commun. C’est donc par un biais inattendu que son exploration des liens entre démocratie et prédation se poursuit, empruntant l’épée du matador ou le sabre d’abordage comme autant de façon possible de philosopher à l’arc !


Jacques Durand a publié dans Libération des chroniques sur la corrida qui ont fait la joie de tous les aficionados de France et de Navarre, révélant à chaque fois une parfaite connaissance de son sujet, une intuition de toutes les facettes de cet art singulier qu’est la tauromachie, associées à une qualité de style rarement atteinte dans ce domaine.


Mercredi 19 mars 2014 à 20h30
Conversation publique
Parution de livre



Rencontre autour de la sortie du livre collectif Considérant qu’il est plausible que de tels évènements puissent à nouveau survenir — Sur l’art municipal de détruire un bidonville 

En présence de Sébastien Thiéry et de nombreux auteurs


Pour faire suite à la première rencontre organisée à l’initiative de Jean-Paul Curnier autour du collectif PÉROU (Pôle d’Exploration des Ressources Urbaines) le 25 février dernier, Sébastien Thiéry reviendra à l’Espace Khiasma nous parler du recueil de textes dont il a pris la direction, et qui vient de paraître chez Post-éditions. Rassemblant les contributions d’écrivains, de philosophes, d’artistes, d’architectes, de paysagistes, de chercheurs, de poètes, de journalistes et de metteurs en scène, c’est au décryptage des huit pages de l’arrêté municipal n°2013/147 (placardé le 1er avril 2013 à l’entrée du bidonville de Ris-Orangis et annonçant la destruction de celui-ci deux jours plus tard) que cet ouvrage collectif est consacré.
Accompagnés par certains de ses auteurs, Jean-Paul Curnier et Sébastien Thiéry présenteront les visées de ce livre et les principes qui en ont guidé la fabrication, et reviendrons sur cette entreprise de traduction d’un texte portant l’estampille de la République qui, sous couvert de raison, prétend que c’est pour leur bien que les occupants de ces habitations « indignes » doivent être évacués.


Mardi 1er avril 2014 à 20h30
Rien à perdre, rien à gagner : la liberté et l’errance
Lecture/performance avec Fantazio


Cette année, le festival Hors limites sera le lieu d’une « halte » pour le cheminement de pensée du philosophe Jean-Paul Curnier. Espaces de rencontres avec le public, agora ou « grand feu » autour desquels faire cercle pour délibérer, ces rendez-vous ponctuant sa résidence à l’Espace Khiasma sont au cœur même de son processus de réflexion. Mieux : ils s’en font pour partie l’objet, et participe de ses objectifs.


Au carrefour de l’anthropologie, de la fiction et de la philosophie politique, l’auteur de Philosopher à l’arc souligne en effet les liens entre fonctionnement démocratique et comportements prédateurs. Mais il s’agit également pour lui d’imaginer de nouveaux modes d’expression et de circulation publique des idées, qui restitueraient leur caractère nomade. Telle cette lecture/performance avec le musicien Fantazio : « pratique musicale de la pensée » où deux voix se répondent comme deux voies se croisent à flanc de colline, à la recherche de la manière la plus noble de perdre son temps et de pratiquer la fuite vers l’avant.


Cette performance est accueillie dans le cadre du Festival Hors limites organisé par l’association Bibliothèques en Seine-Saint-Denis (http://www.hors-limites.fr).


Fantazio, dans le langage des astronomes mélomanes, est un OMI : Objet Musical non Identifié. Une expression reprise à tort et à travers, mais qui trouve avec Fantazio l’une de ses plus belles illustrations. Bête de scène, esprit hanté aux créations incroyablement foutraques, il fédère les foules les plus disparates au gré de ses spectacles aux airs de performances. La démarche de Fantazio n’est pas sans évoquer le projet dadaïste : faire table rase des musiques antérieures et reconstruire un monde musical sous une mosaïque de rythmes punks, phrasés rap, crooner, gondolier vénitien, Spice girls ou Roberto Begnini. « Sombres rêves ou tendres cauchemars : une bouffée d’air toxique pour les tenants du consensus. Enivrante pour qui veut bien y prêter une oreille. Ouvrez la vôtre, l’EleFantazio arrive à grands pas près de chez vous. »


Vendredi 4 avril à 20h30
Pat Garret et Billy the kid
Projection et rencontre avec Christophe Cognet et Jean-Paul Curnier


Dans le cadre de sa résidence d’écrivain à Khiasma, Jean-Paul Curnier propose durant toute l’année 2014 une série d’évènements publics (conversations, performances, concerts) autour de sa recherche sur les relations entre prédation et démocratie. Chaque rencontre explore avec son invité l’un des motifs de son travail d’écriture en cours allant de l’appropriation de la terre à la piraterie en passant par une réflexion sur la place singulière de l’espèce humaine dans son écosystème.


Le cinéaste Christophe Cognet (également en résidence à Khiasma avec son projet Miserrimus) est le troisième invité de Jean-Paul Curnier.

Ils discuteront autour d’un western habité par la musique de Bob Dylan : Pat Garett et Billy the Kid de Sam Peckinpah.

Pat Garett est shérif, Billy the Kid est hors-la-loi. Alors qu’ils furent compagnons de route, le premier défend maintenant l’ordre et la propriété terrienne. Tandis que l’autre distille les derniers parfums anarchiques d’une Amérique sans frontière en train de disparaître.


Christophe Cognet est auteur et réalisateur de documentaires, mais aussi d’essais filmés, courts et moyens métrages. Attentifs aux traces et au travail de la mémoire, sensibles, ses films interrogent le cinéma, les formes de pouvoir et de surveillance, les mécanismes de la création et la puissance des images. Depuis 1993 il mène une méditation filmique sur l’art aux limites de l’expérience humaine, accompagnée de la publication d’articles, d’ouvrages et de conférences. Il est également scénariste, consultant à l’écriture et auteur d’articles sur le cinéma et l’art (dans la revue Vertigo en particulier). Son dernier film Parce que j’étais peintre, l’art rescapé des camps nazis, sortira en salle le 5 mars 2014. Le prochain film, en cours d’écriture, est une libre adaptation du livre Le ParK de Bruce Bégout.

13 mars 2014
T T+