Un atelier d’écriture

Après un premier trimestre d’écriture personnelle et de présence au lycée, voici quelques extraits de textes écrits en atelier par des jeunes de Bac professionnel, à partir de photos de saisonnier.ère.s agricoles :

« Je suis dans mon camion avec mes chiens. Je vis ici car je veux découvrir la nature. J’ai choisi de quitter ma famille. J’aime la nature et la solitude. J’ai eu énormément de problèmes donc j’ai décidé de me retrouver seule pour réfléchir à mes erreurs et aux personnes qui m’ont blessée.
Je vais vous raconter mon quotidien :
Je me réveille, je vais me baigner dans un lac. Puis je prépare mon déjeuner. Pour ça mon camion est assez aménagé. J’ai des plaques de cuisson et du stock. Je me prépare des œufs et du bacon, que je mange avec une pomme et un jus d’orange. Ensuite j’emmène mes chiens en promenade dans la forêt (…) »

« J’en ai marre de mes journées. Je fais tout le temps la même chose de 7h du matin jusqu’à 19h. Charger des bacs de fruits dans un camion. J’ai qu’une envie, c’est de rentrer chez moi jouer aux jeux vidéo. Je suis sûr que mes potes profitent de leurs vacances en allant à la plage, au restaurant ; en jouant à la Play. Moi, quand je rentre, je suis épuisé. J’ai plus la force de faire quoi que ce soit.
Il fait chaud. Je voudrais que cette journée soit terminée. J’ose même pas me retourner, il doit rester une centaine de bacs à remplir et à charger. Et dire que demain il y en aura encore des centaines. J’ai envie d’arrêter. »

« Me voilà dans cette forêt à couper sans m’arrêter. Mon objectif est d’atteindre 60 bûches pour pouvoir les revendre au charpentier du village. Ma hache se dégrade de jour en jour, il faudrait que j’investisse dans une nouvelle. Grâce au bois que je vais revendre, je pourrai m’en acheter une plus robuste. Mon Dieu, que j’aime ce métier ! C’est vrai qu’il demande beaucoup d’efforts, mais je ne songerais pas à arrêter car ce métier atteste et descend des lignées de ma famille. Mon père m’a enseigné le travail de bûcheron durant toute ma jeunesse (…) »

« Je me réveille à 5h30 pour débuter une fois de plus une longue journée. Je suis tellement fatigué… Les tâches que j’exerce chaque jour me font mal. Je sais que quand je vais rentrer, je serai seul ; même pas un proche avec qui passer du temps. Je suis plongé dans une complète solitude. À la pause midi, je mange encore une fois seul. J’ai légèrement du mal à m’intégrer. J’aimerais être comme les autres et être sociable. Les autres membres de l’équipe mangent ensemble, il n’y a que moi qui reste seul. Après tout, mon absence ne les dérange pas.
Après manger, je reprends le boulot. Ces foutues caisses sont tellement lourdes. J’ai oublié mes écouteurs, la musique m’aurait permis de faire passer le temps un peu plus vite. Dans le silence je continue mes tâches, et je me perds dans mes pensées (…) »

« (…) Je pense que l’odeur de la terre me suivra jusqu’à chez moi. J’espère que les gens sur le trajet ne vont pas dire que …˜…˜Oh, le monsieur sent la terre !’’. Parce que l’odeur de la terre est une bonne odeur, pas une odeur désagréable. C’est l’odeur de la nature.
Sans mentir j’ai réellement une très belle vue : le ciel gris-bleu nuageux, le champ, c’est magnifique. Et dire que cette belle vue j’en profite tous les jours. Quelle grâce de l’avoir matin, midi et soir (…) »

3 janvier 2024
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