(2024) Mots sur scène
Elle est loin l’époque où, depuis sa tour d’ivoire, l’écrivain se cantonnait aux mots inscrits sur le papier dans une distance confortable, se contentant de l’effet de son œuvre sur le lecteur. Peu à peu, lectures publiques et performances se sont multipliées, de manière à faire vivre les textes sur scène, en librairie ou bibliothèque, et aussi comme un prolongement de l’écriture elle-même : trouver en écho une voix du corps, incarner une langue personnelle, retrouver la force de l’oralité.
Souvent, une résidence permet d’initier ou de prolonger une telle démarche performative qui, par-delà la prise de risque et le trac immense, peut ouvrir des champs créatifs insoupçonnés et diverses collaborations avec d’autres artistes (écrivains, musiciens, plasticiens, metteurs en scène...).
Christine Guinard s’est lancée dans cette expérience. Une lecture « à voix nue » vaut son pesant d’or, dit-elle : il faut faire confiance au silence, à la puissance de la langue. Ensuite, dans une conception plus élaborée, elle explore dans ses performances le tissage entre texte, voix, musique, travaillant la forme du rituel.
Pour Lucie Rico, le premier rapport à l’écriture a été celui de l’oralité : elle a toujours inventé des histoires. Elle décrit la scène comme un endroit à la fois très excitant et fragilisant. Si cette expérience commune est plus dirigée au niveau du rythme par rapport à l’écrit, elle cherche une forme de performance dans laquelle on pourrait déambuler comme dans un livre.
Nawel Ben Kraïem a commencé par la scène et la chanson, tout en écrivant des textes poétiques qui ne s’inscrivaient pas dans ce cadre et ont ensuite fait l’objet d’un recueil publié. Elle est partie à la découverte d’une nouvelle hybridation, entre littérature et danse.
Sans oublier bien sûr l’écriture théâtrale, destinée d’emblée à la représentation publique : voici l’exemple de Pierre-Vincent Chapus, qui a entamé un travail d’écriture de longue haleine et « par flots », au plus près des personnes qui l’accompagnent au centre d’accueil de jour de Gagny. Les textes sont les témoignages de cette vie partagée dans « un ressassement, une mise en question de vagues mémorielles et amoureuses ».
À lire aussi :
Poésie & Performance, Olivier Penot-Lacassagne & Gaëlle Théval (ouvrage collectif), éditions Cécile Defaut, 2018.
Voir et écouter à ce sujet la soirée remue Poésie et performance aujourd’hui.
Par ailleurs, de nombreuses vidéos de lectures et performances sont visibles sur remue, dont une grande partie concerne les résidences en Région Île-de-France ; on retrouve l’ensemble ici : https://remue.net/video